Lego veut se tourner vers le durable
Avec ses briques incassables et réutilisables à l'envi, Lego -une contraction du danois 'Leg godt' ('joue bien')- a toujours eu à l'esprit la durabilité, affirme Tim Brooks, chargé du développement durable. "Nous voulons utiliser le plastique de manière responsable".
Le groupe doit s'adapter aux exigences actuelles. D'après une récente étude du cabinet spécialisé NPD, 47% des acheteurs dans le monde ont renoncé à un jeu à cause de préoccupations de durabilité. "Les fabricants de jouets s'intéressent vraiment à ce sujet (...) et il y a beaucoup d'innovations dans les emballages et les matériaux", explique Frédérique Tutt, experte du jouet pour NPD.
Pas question pour Lego de renoncer au plastique, il s'agit plutôt d'améliorer sa brique, actuellement majoritairement conçue avec du plastique "ABS" utilisé aussi dans l'électroménager.
Pour l'instant, seulement 2% des briques -soit 80 des 3.600 éléments vendus- proviennent d'un matériau biosourcé: le polyéthylène à base de canne à sucre, qui sert principalement aux arbres, feuilles et buissons des kits.
Une gageure technique car la substitution doit être invisible pour les consommateurs. Les nouveaux modèles doivent avoir les mêmes propriétés physiques que les anciens: rigidité, brillance mais aussi et surtout l'emboîtage, afin de rester compatibles.
Transmission
Au fil des années, le géant danois est passé de la simple brique neutre aux univers complets comme celui d'Harry Potter. Il s'est démultiplié pour entrer dans l'ère de la modernité virtuelle: de l'application Lego Life aux jouets connectés et autres blockbusters du cinéma.
Un positionnement qui a redonné des couleurs à cette société familiale non cotée qui était moribonde au début des années 2000. En 2019, son chiffre d'affaires a ainsi progressé de 6%. D'autant que l'amour de la brique, qui peut se recycler, se transmet de génération en génération.
Selon Tim Brooks, 96% des consommateurs gardent leurs jouets ou les transmettent, preuve que la brique en plastique n'est pas à usage unique.
"Vous pouvez acheter aujourd'hui sur les étals un produit qui fonctionne avec un autre de la fin des années 1950", explique-t-il.
Outre le bioplastique, Lego -qui pilote aux Etats-Unis un projet de réutilisation de ses pièces en faveur d'enfants défavorisés- s'aventure aussi prudemment sur le terrain du plastique recyclé. "Les matériaux recyclés sont un sujet très intéressant mais on a besoin de savoir d'où ils proviennent", relève M. Brooks.
L'entreprise, qui produisait originellement des jouets en bois, garde secrète sa recette de fabrication mais garantit réutiliser les chutes de plastique dans la production.
En 2014, elle s'est engagée à diminuer son empreinte carbone, en partenariat avec l'ONG WWF, et affirme utiliser exclusivement des sources d'énergie renouvelables depuis 2017. "Ils ont fait des économies d'énergie pour le climat et se sont tournés vers plus d'éoliennes. Désormais, ils cherchent des alternatives à leur plastique et nous leur apportons notre expertise technique", se félicite Bo Oksnebjerg, secrétaire général de WWF Danemark.
Kirkby, la maison mère de Lego, a investi près d'un milliard de dollars dans des parcs éoliens. Lego travaille aussi sur ses emballages, dont il a déjà réduit la taille ce qui lui permet de diminuer ses coûts de transport. A l'horizon 2025, ils seront en matériaux renouvelables ou recyclés.
Pour Antidia Citores, porte-parole de la fondation de protection de l'environnement Surfrider Europe, l'utilisation d'un plastique différent n'améliorera pas la situation car, dans le domaine du jouet, ce n'est pas la production mais l'échange qu'il faut plébisciter.
"Changer un plastique par un autre ne constitue pas une révolution ni sur le polluant, ni sur les émissions de dioxyde de carbone", résume la militante.