Tests sur les animaux en laboratoire : où en est la Belgique ?
C'est une pratique qu'on ne voit pas, ou qu'on ne veut pas voir. Beaucoup de citoyens l'oublient ou n'en ont tout simplement pas conscience. Pourtant, les expériences sur des animaux à des fins scientifiques sont une réalité en Belgique. Notre pays fait même partie des pays européens qui pratiquent le plus de tests sur les animaux. D'après les derniers chiffres officiels, 511.194 tests ont été réalisés sur des animaux en 2017 en Belgique, qui se classe derrière l'Allemagne et la France (environ 1,8 million de tests chacun), l'Espagne (725.833 tests) et l'Italie (569.177 tests).
En Belgique, toujours en 2017, 1.856 de ces tests ont été réalisés sur des chiens. C'est le quatrième pays d'Europe en la matière. Notre pays est aussi le 4e État membre à avoir recours aux tests les plus douloureux sur les animaux. Ainsi, 82.536 expériences ont soumis les animaux à une souffrance qualifiée de «grave» par les chercheurs. Cela représente 16,5% des tests effectués sur notre territoire.
Pourquoi faire des tests sur des animaux ?
Dans l'Union européenne, les animaux sont utilisés pour les études de biologie fondamentale; la recherche et le développement, mais aussi la production de produits, dans les domaines de la médecine humaine, de la médecine vétérinaire et de la dentisterie. Certaines de ces expériences sont aussi des essais toxicologiques et des études de sécurité sur des substances chimiques. Enfin, il existe d'autres utilisations expérimentales: virologie, traitements oncologiques (anti-cancéreux), recherche et développement pharmaceutiques, essais d'associations de médicaments, génétique,etc.
Les souris, les rats, les poissons et les oiseaux représentent environ 90% des animaux utilisés en recherche. Environ 10% de ces animaux sont des lapins, des poulets et des cochons d'Inde. Le pourcentage est très faible mais des dizaines de milliers de chiens, de chats et de macaques servent chaque année à faire des tests dans des laboratoires dans l'UE.
Deux visions opposées
Deux camps aux opinions diamétralement opposées s'affrontent à propos de ces expériences. D'un côté, il y a les scientifiques et les organisations qui défendent les tests sur les animaux. «Les recherches sur les animaux sont de plus en plus pointées du doigt par une partie de l'opinion publique, alors qu'elles sont indispensables pour faire progresser la biologie et la recherche médicale», assurait en 2015 Daniel Boujard, directeur adjoint scientifique en charge des animaleries à l'Institut des sciences biologiques du CNRS (INSB).
Sur son site internet, l'European Animal Research Association (EARA) publie quant à elle 40 raisons en faveur de l'utilisation d'animaux dans la recherche. Selon cette association, la recherche sur les animaux a joué un rôle essentiel dans presque toutes les percées médicales au cours de la dernière décennie et pratiquement tous les prix Nobel de physiologie ou de médecine depuis 1901 se sont basés sur des données animales pour leurs recherches.
De l'autre côté, de nombreuses associations de défense des animaux se mobilisent en faveur de l'arrêt des expériences sur les animaux. C'est notamment le cas de Peta ou encore de Gaia et de S.E.A. en Belgique. «La plupart d'entre nous n'accepteraient pas que des millions d'êtres humains naissent chaque année dans le seul but d'être soumis contre leur gré à des tests dangereux et invasifs. Alors, pourquoi accepterions-nous que des animaux non humains soient privés de nourriture, d'eau ou de sommeil, ou bien soient empoisonnés, brûlés, gazés ou électrocutés avant d'être enfin tués?», estime Peta.
Une campagne dans le métro
Durant cette rentrée, l'asbl S.E.A. (Suppression des Expériences sur l'Animal) a lancé une grande campagne d'affichage dans 15 stations du métro de Bruxelles. «Ils disent que nous ne souffrons pas. Aidez-nous! Stop aux animaux dans les labos», peut-on lire sur l'affiche accompagnée de la photo d'un Beagle, la tête vers le bas.
«Les chiffres en constante augmentation ces dernières années montrent qu'il n'y a pas de réelle volonté des expérimentateurs de diminuer l'expérimentation animale. Or, la directive européenne de 2010 sur les animaux de laboratoire dit qu'il faut privilégier les méthodes sans animaux et il y a des méthodes alternatives existantes, indique Solange T'Kint, administratrice de l'asbl S.E.A.
«Notre priorité est un financement contrôlé des alternatives, l'intégration de la protection animale dans les commissions d'éthique et que les citoyens fassent pression sur les représentants politiques, notamment sur Thomas Dermine le nouveau secrétaire d'État chargé de la Politique scientifique, en relayant nos pétitions», conclut-elle.
Thomas Wallemacq