«Black Bird», une nouvelle série Apple TV+ sur le milieu carcéral à ne pas rater
Cela fait longtemps que le réalisateur belge Michaël R. Roskam (‘Rundskop’) a son passeport pour l’Amérique. En 2014, il y tournait par exemple le drame policier ‘The Drop’ avec Tom Hardy. Cette fois, il a traversé l’océan pour ‘Black Bird’, une mini-série en six épisodes sur un trafiquant de drogue condamné (Taron Egerton) et engagé pour coincer un tueur en série présumé (Paul Walter Hauser). Une histoire vraie.
Qu’est-ce qui vous a attiré dans cette histoire?
Larry Hall est une figure fascinante parce qu’on ne sait pas s’il est un serial killer ou un serial confessor, quelqu’un qui avoue des crimes qu’il n’a pas commis pour qu’on parle de lui. Quelle est l’importance de cette ambiguïté dans la série?
«En fait, c’était la décision de Dennis Lehane, l’auteur de la série [et aussi de ‘The Drop’, ndlr], de jouer sur cette ambiguïté. Mais tout le monde était d’accord. Dennis, moi-même et aussi l’acteur Paul Walter Hauser, avons toujours eu l’intention de semer le doute autant que possible.»
Comment avez-vous façonné l’interprétation de Paul? Existe-t-il des enregistrements audio et vidéo du vrai Larry Hall?
«Il y a des témoignages sur comment il est et je pense qu’il existe quelque part un seul enregistrement difficile à obtenir. Mais je ne voulais rien entendre ou voir de tout ça. J’ai confié ce personnage à Paul. Totalement. C’est aussi une de mes manières de travailler. Je suis le narrateur, le personnage appartient à l’acteur. Si moi je crois ce que l’acteur en fait, tout le monde le croira.»
Paul Walter Hauser est vraiment très bon. Il glisse du misérable au menaçant. Saviez-vous dès le début qu’il avait ça en lui?
«J’étais déjà fort impressionné quand j’ai vu Paul dans ‘Richard Jewell’ de Clint Eastwood. Lors de la scène finale de ce film, où il craque alors qu’il mange un donut et apprend que le FBI ne le considère plus comme un suspect, j’ai su qu’il faisait partie des grands. Maintenant, j’ai pu le voir en vrai aussi, tous les jours. Il est phénoménal. En réalité, c’est un comique. Il aime faire du stand-up pour son plaisir. Il a un incroyable talent comique. Vous pouvez le mettre à côté de Jim Carrey sans problème. Il est en outre très intelligent. Un type formidable. Je me suis énormément amusé avec lui aussi. J’espère vraiment pouvoir retravailler avec lui.»
Le regretté Ray Liotta joue aussi dans la série, dans un de ses derniers rôles. Pour ‘The Drop’, vous aviez James Gandolfini dans son tout dernier rôle. Portez-vous malheur?
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Votre ami Matthias Schoenaerts joue dans presque tous vos films. Avait-il été question qu’il joue aussi dans ‘Black Bird’?
«Matthias me demande à chaque projet ‘Il y a un petit rôle? Il y a un petit rôle?’ (
Vous êtes-vous beaucoup documenté sur la vie carcérale? C’est un monde tout à fait à part.
«J’avais déjà l’expérience nécessaire grâce à mon film ‘Le Fidèle’. Cela fait des années aussi que je m’implique dans l’asbl De Huizen [une organisation qui œuvre pour des prisons plus petites et plus humaines en Belgique, ndlr]. En fin de compte, le monde carcéral est universel aussi. Vous trouvez partout les mêmes règles. Dans le cas de ‘Black Bird’, il s’agit cependant d’une prison psychiatrique. Ça, c’est l’enfer sur terre. Springfield, la prison au Missouri dont nous parlons dans cette série, existe toujours, mais il en existe très peu d’images. Nous avons trouvé trois photos montrant l’intérieur, et nous avons dû nous contenter de ça.»
Les deux premiers épisodes de ‘Black Bird’ sont déjà disponibles sur Apple TV+. Un nouvel épisode est ensuite diffusé chaque vendredi.
Review
L’idée d’un ‘Silence des Agneaux’, p. ex., vous semble-t-elle tirée par les cheveux? Pensez-vous que la police ne demanderait jamais l’aide d’un criminel pour coincer un psychopathe (présumé)? L’histoire que raconte ‘Black Bird’, la série en six épisodes d’Apple, n’en est pourtant pas loin et est basée sur des faits réels. Le personnage principal Jimmy Keene n’est certes pas un Hannibal Lecter, mais un type charmant qui a très mal tourné. Quand il se retrouve derrière les barreaux pour de longues années, le FBI lui propose un deal pour s’acquitter de sa peine: une mission sous couverture dans une prison psychiatrique pour amener un détenu, Larry Hall, à livrer la preuve irréfutable de toute une série de meurtres. Un excellent point de départ pour un thriller, et ‘Black Bird’ offre un vrai suspense dans les deux premiers épisodes surtout. Avec Paul Walter Hauser dans le rôle de Larry Hall, on a ici en outre un acteur qu’on ne peut quitter des yeux. Dommage que le scénario commence à tanguer vers la fin -où sont passés le gardien corrompu et le sinistre gangster?- mais en tant que duel psychologique sur le fil du rasoir, la série vaut la peine. Et à la longue, on éprouve vraiment une certaine sympathie pour Hall. 3/5