«La Vraie Famille», Mélanie Thierry épate en mère d’accueil protectrice: «L’alchimie, ça ne se calcule pas»
En ciné (‘Au Revoir Là-haut’) comme en télé (‘En Thérapie’), Mélanie Thierry a plus d’un tour dans son sac. Mais rien n’annonçait l’avalanche émotionnelle de ‘La Vraie Famille’, l’histoire d’une mère d’accueil dépassée par sa mission. Un rôle qui lui vaut un paquet de récompenses, franchement méritées!
Comment décririez-vous le personnage d’Anna, cette mère d’accueil réagissant tant bien que mal aux retrouvailles de son enfant avec son père biologique?
Mélanie Thierry: «Je dirais que c’est une maman. Et une épouse aussi. Elle, son mari et leurs deux enfants ont une famille qu’ils ont réussi à construire dans une harmonie totale, et dans un épanouissement où on prend le temps de voir les enfants grandir. On devine qu’elle a décidé du jour au lendemain d’être famille d’accueil, sans doute parce que son métier ne lui convenait pas. Elle se dit: ’Pourquoi pas moi?’. Elle se dit qu’il y a quelque chose de gratifiant à faire grandir un enfant en manque d’amour, et l’armer pour plus tard. Et bon, même si le pacte est clair et qu’un cadre est dessiné, six ans plus tard, force est de constater qu’elle a trois enfants et pas deux. Et que le troisième, celui qu’elle a accueilli, fait totalement partie des membres de cette famille. Il n’y a plus de point d’interrogation… Mais quand on s’attache à ce point, c’est difficile de se rappeler qu’il ne faut pas trop aimer.»
Anna franchit-elle la ligne rouge?
«Anna se trouve dans cette situation qui la déborde et la fait vaciller. Elle va ressentir un vrai tsunami, parce qu’elle l’a inconsciemment mis de côté. Elle a beau savoir dès le départ que l’enfant sera amené à retrouver son père, et qu’on le lui souhaite bien d’ailleurs, elle n’anticipe pas le séisme qui arrive. Et il va déséquilibrer toute sa famille, à commencer par la fratrie des enfants. Ça la mène à une frontière où elle se partage entre le désir de bien faire et ses instincts de mère. Alors elle fait du mieux qu’elle peut, mais en se plantant parfois. Et on la comprend totalement.»
Vous avez fait des recherches sur le sujet des familles d’accueil?
«Non, je n’en ai pas fait. Il se trouve quand même que Fabien (Gorgeart, le réalisateur, NDLR) m’a appris que c’était son histoire, qu’il avait vécue avec un frère d’accueil pendant plusieurs années. Je m’en doutais un peu, on n’écrit pas un scénario avec autant de justesse sans être connecté de l’intérieur au récit. Mais des recherches, je n’en ai donc pas fait. Je me suis finalement mis au même endroit que mon personnage: je suis maman, j’aime mes gosses… et je vais être percutée par un tremblement de terre à cause d’un débordement d’amour.»
Il y a quelque chose dans votre proximité avec les jeunes jouant vos enfants qui dépasse le jeu. Comment vous êtes-vous apprivoisés?
«C’est une forme de petit miracle. On a eu quelques jours de répétition avant le tournage pour apprendre à se connaître. On était cinq étrangers au départ, quand même! Fabien voulait réaliser la version filmée d’un album de photos de famille, mais ce concentré de vie authentique tombe à plat si on ne croit pas à la famille. Le film ne tiendrait plus la route, il fallait donc la faire exister à tout prix, et que le spectateur y soit entièrement plongé. Mais concrètement, on n’a pas suivi de recette miracle avec les enfants, non. Ils ont bien été choisis, tout simplement. Ils étaient intelligents, investis, conscients de qui leur était demandé. Puis j’ai eu la chance de partager tout ça avec Lyes Salem, qui joue mon époux. Et ça non plus, ça ne s’explique pas, mais notre couple existait tellement facilement qu’on pouvait s’y projeter. Tout ça, on n’y est pas pour grand-chose. Oui, c’est nous qui fabriquons et fournissons le travail, et on va tout faire pour qu’une émotion sincère traverse le regard des enfants quand on tourne. Mais l’alchimie ça ne se calcule pas. Faut être à l’écoute, faut être présent, et faut pas tricher.»
«La Vraie Famille»: notre review
Anna (Mélanie Thierry) est partagée! Dans le cadre d’un programme de famille d’accueil, le petit Simon vit avec elle, son mari et ses deux enfants depuis cinq ans, et fait désormais partie de la famille. Quand le père biologique (Félix Moati) de Simon demande qu’il cesse de l’appeler ‘maman’, confirmant son intention de bientôt rappeler son fils à lui, Anna vacille. Ce retour était pourtant annoncé dès le départ… mais pas le débordement d’amour étourdissant qui va l’accompagner! Au-delà du thème de l’attachement familial et du bien-être d’un enfant, ‘La Vraie Famille’ convainc sans effort grâce à la vague d’émotion qu’il provoque. Avec la force des sentiments, on est plongés dans cette famille de classe moyenne et le dilemme de sa matriarche, pour une chronique qui devrait vous chauffer les joues et vous inonder les yeux. Une énergie de téléfilm se dégage parfois de la mise en scène, mais Mélanie Thierry donne tout, les gamins jouent bien, et nos mouchoirs s’en souviennent.