Michel Leeb : «Il y a beaucoup de choses que l’on n’avoue pas» (interview)
Dans «Inavouable», Michel Leeb joue le rôle de Gaspard, un homme qui vit une retraite heureuse avec sa femme Clémence. Leur sérénité va cependant voler en éclats lors d’une dispute où certaines vérités cachées vont refaire surface.
Avez-vous déjà vécu une situation qui aurait pu dégénérer comme c’est le cas dans la pièce?
«Heureusement non car cela dégénère vraiment très fort. Donc non, jamais!»
Pourquoi les pièces familiales fascinent-elles autant? Car les gens se projettent dedans?
«C’est surtout parce que les gens rient. Ils savent où ils mettent les pieds. Ici, le sujet de la pièce, ce sont les choses inavouables. Et il est vrai que, quand, dans des familles, il y a des non-dits en permanence, lorsque tout se révèle un soir, ça peut être violent. À partir du moment où c’est bien écrit et que c’est drôle, les gens accourent, surtout en ce moment.»
En parlant du public, vous sentez que cela lui fait du bien de retrouver les salles de théâtre?
«Oui, c’est indispensable. Mais je crains que cela devienne de plus en plus difficile d’attirer le public dans les salles. Avec cette pandémie qui n’en finit pas de recommencer, les gens sont refroidis. Il n’y a que nous qui ne sommes pas refroidis car on est obligés de monter sur scène, c’est notre boulot. Mais je pense que les gens ont fondamentalement besoin du théâtre et on le sent. En ce moment, à Paris, les gens rient de bon cœur. Le public est vraiment orienté vers le rire.»
Quelle est la pire chose que vous n’ayez jamais avouée?
«Il y en a énormément, je pourrais passer trois heures dessus (rires). Non mais il y a beaucoup de choses que l’on n’avoue pas, ce sont des petits secrets personnels… Et c’est très bien que l’on ait chacun des secrets, que l’on ait un jardin secret dans un couple. C’est quand même assez agréable d’avoir des choses qui sont tout à fait personnelles. À partir du moment où on sait tout, où on déballe tout, cela finit généralement mal.»
Le spectacle a-t-il évolué avec la pandémie?
«Oui. Il a évolué dans le jeu mais pas tellement dans le texte car il est d’Eric Assous qui est décédé au mois d’octobre 2020. Par respect, on ne modifie donc pas le texte. On rajoute un mot ou l’autre car c’est venu à la longue mais on ne change pas fondamentalement le texte. Le jeu et la mise en scène ont par contre évolué. Jean-Luc Moreau a refait une mise en scène qui est tout à fait géniale et très drôle. Cela joue beaucoup. Quand on a un beau texte avec une belle mise en scène, c’est génial.»
Il y a quelques semaines, vous annonciez vous censurer pour éviter les menaces de mort. Est-on obligé d’avoir un discours plus lissé aujourd’hui?
«Je trouve en effet qu’il faut faire attention à ce qu’on dit aujourd’hui, c’est devenu dangereux de dire certaines choses. Et personne n’a envie de recevoir des menaces de mort. Je n’en ai encore jamais reçues mais ça doit être épouvantable. Et vu que la situation est extrêmement tendue de ce côté-là, autant l’éviter. Ça ne me ferait pas plaisir d’être trucidé.»
En 2017, vous étiez accusé de plagiat par CopyComic. Où se trouve la limite entre l’inspiration et le plagiat?
«Vous savez, tout le monde est l’héritier de quelqu’un. Tout le monde a commencé avant l’autre et ça ne finit pas. Platon a plagié Aristote… C’est compliqué parce qu’on voit et on entend partout des choses qui sont formidables. On est donc influencés de partout, que ce soit moi ou d’autres artistes ou humoristes qui se sont fait allumer par CopyComic. Je crois que ça dure un temps et puis ça s’essouffle vite car c’est épuisant à la fois pour celui qui lit et pour celui qui recherche. Après, ce n’est pas très agréable de recevoir une tartine dans ce genre-là dans la figure. Mais tout ça, c’est secondaire.»
Votre fils, Tom, poursuit sa belle carrière. N’avez-vous pas peur qu’il vous vole la vedette un jour?
«(Rires). Non, c’est très agréable qu’on me dise ‘mais vous êtes le père de Tom Leeb’. Cela m’amuse plus que tout, j’adore ça. Je suis très fier de mon fils et je n’ai pas l’ombre d’une jalousie ou d’une convoitise envers lui. Je regrette juste une chose, c’est de ne pas avoir 30 ans comme lui (rires). Je dis généralement que lui, c’est moi, mais en mieux.»
Vous êtes devenu grand-père il y a peu. Qu’est-ce que cela vous inspire à l’époque actuelle?
«C’est un cadeau merveilleux de la vie dans cette période tellement noire, tellement sombre, et tellement angoissante. Être grand-père, c’est une deuxième naissance pour moi. C’est comme si je replongeais 35ans en arrière avec mes enfants, c’est génial! Ce petit bébé, il est magnifique. Alors évidemment, on peut se demander dans quel monde cette petite fille va grandir. Un monde qui peut être dur, violent et difficile. Mais elle est entourée de tellement d’amour… Ça embellit ma journée à chaque fois que je la vois.»
«Inavouable», du 18 au 25 octobre 2022 en Wallonie et à Bruxelles. Infos & réservations: