Festivals : Les bracelets «cashless», la nouvelle pompe à fric?

Ce qui devait au départ faciliter la vie des festivaliers est peu à peu en train de leur gâcher la vie… Entre le montant minimum à charger, les «monnaies locales» utilisées, le fait de devoir payer pour récupérer son argent et la sécurité, le bracelet «cashless» est loin de faire l’unanimité.

par
Thomas Wallemacq
Temps de lecture 5 min.

Il y a encore quelques années, pour acheter à manger et à boire dans les festivals, il suffisait d’acheter le nombre souhaité de jetons ou de tickets et de les dépenser dans les stands de son choix. Principal désavantage: glissés dans une poche, ils se perdaient assez facilement, surtout avec quelques verres dans le nez. Ce qui pouvait faire le bonheur d’autres festivaliers.

Le cashless, c’est quoi?

Mais la technologie est passée par là et aujourd’hui, la plupart des festivals sont passés au bracelet «cashless». Le principe est simple: chaque bracelet est équipé d’une petite plaquette sur laquelle se trouve un code QR unique. C’est grâce à ce code QR que vous allez pouvoir mettre de l’argent sur votre compte afin de pouvoir acheter des boissons et de la nourriture lors du festival. Votre bracelet devient ainsi un porte-monnaie électronique. Il vous suffit simplement de tendre votre bracelet aux vendeurs pour que la transaction se fasse. Sur le papier, c’est simple et basique. C’est plus rapide et ça permet notamment d’éviter des transactions avec de l’argent liquide. Mais dans la pratique, le bracelet «cashless» a aussi quelques défauts.

Une manière d’embrouiller les festivaliers

Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué? C’est ce qu’on peut se dire en constatant ce qu’est devenu le bracelet «cashless» dans les différents festivals cet été. Tout d’abord, on aurait pu imaginer que les organisateurs fassent en sorte qu’une unité rechargée sur le bracelet corresponde à un euro. Mais cela aurait été bien trop simple. À la place, chaque festival a sa propre «monnaie locale». À Rock Werchter, c’était le Coin qui vaut 3,5 €. Même chose au Graspop avec le Skully. Mais si vous allez à Tomorrowland cet été, ce sera le Pearl qui sera utilisé et un Pearl est égal à 1,74 €. À Werchter, une bièrecoûte un Coin. Mais cela devient bien plus compliqué lorsqu’on veut acheter un paquet de frites (2,2 Coins) ou un cornet de pâtes (4,2 Coins). Il faut presque sortir sa calculette pour savoir ce que vaut en euros le plat qu’on commande. Tout semble être fait pour embrouiller le festivalier. Et c’est loin d’être terminé. En effet, on ne peut pas recharger uniquement quatre ou cinq unités sur son bracelet. Pour une raison difficilement justifiable, sauf pour faire toujours plus de profits, la plupart des festivals instaure un montant minimum à charger sur son bracelet. À Tomorrowland, c’est 11,5 Pearls, soit20 €.

Comment récupérer son argent?

Entre le montant minimum à charger et les montants à virgules ou encore la consigne pour les gobelets réutilisables, de nombreux festivaliers se retrouvent avec encore du crédit sur leur bracelet au moment de quitter les lieux. Plusieurs solutions s’offrent à eux: (essayer de) se faire rembourser, soit décider de jeter l’éponge, plus ou moins volontairement, et de laisser le montant qui reste sur le bracelet «cashless» dans les poches de l’organisateur. «J’ai rechargé 15 € sur mon bracelet que je n’ai pas utilisés. J’étais bien trop défoncée pour me faire rembourser à la borne», racontait dès l’été 2018 une festivalière qui expérimentait le «cashless» au festival Sonar à Barcelone. Elle est loin d’être la seule dans ce cas. Car évidemment, rien n’est fait pour simplifier le remboursement du montant qui reste sur le bracelet. Là encore, chaque festival ou presque applique ses propres règles et sa conception des «frais administratifs». À Werchter et à Tomorrowland, il faut ainsi payer l’équivalent de 3, 5 € pour récupérer son argent. Au Graspop, c’était deux fois moins cher. À Ronquières, l’organisation ne remboursera pas les montants en dessous de 3 € mais il n’y a pas de frais de dossier pour le reste. De manière générale, il est possible de demander le remboursement une fois arrivé chez soi. Attention donc de ne pas jeter ou perdre votre bracelet trop vite et d’être dans les délais imposés par le festival. Enfin, il faut parfois se montrer patient pour recevoir le remboursement de l’argent qui restait sur le bracelet. Cela peut parfois prendre jusqu’à un mois en fonction du festival.

Une sécurité épinglée

Aujourd’hui, les festivaliers ne se baladent plus avec du cash dans leurs poches. Mais avec les bracelets «cashless», ils ont parfois des dizaines d’euros autour du poignet. Au premier abord, on pourrait penser que c’est plus sécurisé. Néanmoins, cette technologie soulève aussi quelques questions sur la sécurité. En effet, avec une simple photo du code QR qui se trouve sur votre bracelet, une personne mal intentionnée peut potentiellement utiliser vos crédits. Pour vous protéger, évitez de poster sur les réseaux des photos où votre bracelet est visible et enregistrez directement votre bracelet à votre nom (cela permettra aussi de vérifier votre solde restant et plus tard de demander le remboursement).

Les Francos font marche arrière

C’est depuis l’été 2018, bien avant la crise sanitaire, que les festivals ont commencé à se tourner en nombre vers les bracelets «cashless». Les Francofolies de Spa ont suivi le mouvement mais en 2022, les organisateurs ont décidé de faire marche arrière, trouvant au final ce système «peu approprié à un festival urbain comme le leur».L’an passé, les Francos proposaient aux festivaliers de payer via l’application Paybonsai. Cette application belge éco-responsable s’était engagée à planter un arbre tous les dix paiements effectués via ses services. Résultat: les festivaliers ont permis de planter 3.706 arbres. Cette année, l’application Paybonsai collabore avec le CORE Festival Brussels, le Graspop, Werchter Boutique, TW Classic, Rock Werchter, Tomorrowland et Pukkelpop. Elle espère planter 250.000 arbres. Quant aux Francos, le cashless a définitivement été abandonné. «Vous pourrez payer vos diverses consommations par carte ainsi qu’en liquide à certains endroits du festival. Nous ne mettons pas en place de système de cashless», peut-on lire sur le site du festival.

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