L’appareil photo jetable s’offre une seconde jeunesse mais il fait aussi des déçus: «Aucune photo n’était lisible»
Après les vinyles, un autre objet qu’on pensait être dépassé renaît de ses cendres et commence une nouvelle vie auprès de la nouvelle génération: l’appareil photo jetable.
C’est une époque que les moins de 30ans ne peuvent pas connaître. Mais celles et ceux qui ont tenu un appareil photo jetable entre les mains dans les années 1990 s’en souviennent forcément. Que ce soit pour une excursion scolaire, des vacances en famille ou une colonie, les jeunes de l’époque pouvaient emporter avec eux un appareil photo jetable. On achetait ça pour une bouchée de pain au supermarché ou à l’épicerie du coin. On tournait la roulette en plastique avant chaque photo, on appuyait sur le déclencheur et le tour était joué. Certains modèles étaient équipés d’un flash. Il fallait alors appuyer sur un petit bouton pour l’activer et ensuite atteindre qu’un petit voyant rouge s’allume pour prendre la photo. Avec seulement 27 ou 36photos à prendre selon les modèles, il ne fallait pas se rater et faire le bon choix. Il fallait ensuite attendre plusieurs jours, voire plusieurs semaines, pour découvrir le résultat après avoir déposé l’appareil chez un photographe.
La qualité n’était pas toujours au rendez-vous. Les appareils photo jetables étaient très rudimentaires. Ils n’avaient pas de zoom, certains n’avaient même pas de flash. Après le développement, certaines photos pouvaient être complètement ratées. Mais le plaisir et les souvenirs étaient quand même au rendez-vous.
Et puis, à la fin des années 1990 et au début des années 2000, les appareils photos numériques puis les smartphones ont envahi le marché. De nombreux magasins de photographie ont fermé leurs portes et les appareils photos jetables ont peu à peu sombré dans l’oubli. Mais à la surprise générale, depuis quelques années, ils refont surface. Mais alors qu’on aurait pu croire que le phénomène resterait marginal, il ne cesse de prendre de l’ampleur. Pour s’en rendre compte, il suffit de se rendre sur des enseignes en ligne et de commencer à taper «appareil photo» dans la barre de recherche. Dans les propositions automatiquement soumises aux visiteurs, l’appareil photo jetable arrive en tête bien avant les termes «appareil photo numérique» et «appareil photo reflex».
Face à la demande croissante, de nombreuses enseignes proposent à nouveau à la vente des appareils photo jetables. En moyenne, il faut compter une vingtaine d’euros pour un appareil photo avec flash incorporé capable de prendre 27clichés. Il y a aussi moyen de trouver moins cher avec le Fujifilm Quicksnap par exemple disponible à 12,99€ à Mediamarkt. Au-delà de l’achat de l’appareil à usage unique, il faut également compter les frais de développement. Et là la facture peut rapidement devenir salée puisqu’il faut compter une bonne vingtaine d’euros chez un photographe. Certaines grandes surfaces proposent également ce service à un coût moindre (parfois moins d’une dizaine d’euros si elles ne sont imprimées) mais pour un résultat parfois moins convaincant.
Des utilisateurs déçus
On l’a vu plus haut, avec les appareils photo jetables, on n’est jamais à l’abri d’une mauvaise surprise. Il est donc assez amusant de découvrir les commentaires laissés par les nouveaux acheteurs sur un célèbre site de vente en ligne. Parmi les utilisateurs ayant laissé une note de 1/5 à un appareil photo jetable, il y a ce père de famille qui écrit: «Nous l’avons acheté pour notre fils pour une sortie scolaire. La pellicule était grillée…». Il y a aussi Arthur qui se rend compte que ce type d’appareil n’est pas vraiment compatible avec l’obscurité. «Qualité médiocre en utilisation intérieure et en soirée», indique-t-il en soulignant que cet appareil n’était pas fait pour la nuit. «Appareil déposé au laboratoire pour développement de photo mais malheureusement aucune photo n’a été exploitable», indique un autre. Il y a aussi ce témoignage d’une mère de famille. «Dégoûtée… je l’ai utilisé pour le jour de la naissance de mon premier enfant histoire d’avoir des photos uniques de chaque ‘premier moment’ de mon fils. Impatiente de recevoir les tirages de ces photos qui ne peuvent pas être retouchées. Imaginez mon désarroi en découvrant qu’aucune n’était lisible. Elles sont toutes sorties jaunes avec des formes indistingables», regrette cette cliente.
Spontanéité et authenticité
Malgré quelques ratés, s’il y a un tel engouement pour l’appareil photo jetable, c’est pour les valeurs qu’il véhicule. Au-delà de l’aspect vintage, les jeunes semblent apprécier l’authenticité des photos obtenues. Ici, impossible de retoucher les photos ou d’ajouter les filtres apparus avec les réseaux sociaux. Et si le résultat n’est pas toujours à la hauteur, cela fait partie du charme de l’appareil photo jetable. On ne sait pas sur quoi on va tomber et c’est ce côté aléatoire qui semble également plaire à certains utilisateurs. Enfin, à l’heure où l’immense majorité des photos restent au format numérique, le développement du film d’un appareil photo jetable permet d’avoir ces souvenirs pour la vie, imprimés sur du papier photo.
Une aberration écologique?
On l’a vu, les appareils photo jetables ne sont pas vraiment économiques. Mais sont-ils écologiques? Comme la plupart des produits à usage unique, leur empreinte écologique soulève de nombreuses questions. Derrière la façade en carton se cache un boîtier en plastique qui finira à la poubelle. Le flash sera lui aussi détruit. De plus, il nécessite une petite batterie pour fonctionner qui sera utilisée, au mieux, pour 36 photos. Quel gâchis! Dans sa composition, l’appareil photo jetable n’a donc rien d’écologique. Et encore, c’est sans compter sa pellicule et son développement. Les pellicules sont composées de plastique mais aussi d’halogénure d’argent. Pour les développer, il faut utiliser des révélateurs et des fixateurs chimiques. Si vous succombez à la tentation, pour limiter un peu votre impact, achetez plutôt un appareil argentique réutilisable. Il coûte à peine deux fois plus cher qu’un appareil jetable et pourra au moins être réutilisé à volonté.