Qu’est-ce que le sadfishing, cette nouvelle tendance sur les réseaux sociaux?
Exprimer sa tristesse, son désarroi, voire ses angoisses sur les réseaux sociaux permettrait aux influenceurs de susciter l’intérêt – et donc l’engagement – des utilisateurs. Une tendance comportementale qui se traduit par le terme ’sadfishing’. Le phénomène est tel qu’il a donné naissance à un nouveau filtre sur Snapchat.
Bella Hadid a fait parler d’elle en novembre dernier après avoir posté sur Instagram une longue publication concernant son mal-être, accompagnée de plusieurs selfies mettant en scène ses yeux rougis de larmes. L’objectif? Rappeler à sa communauté que «les réseaux sociaux ne sont pas la réalité», autrement dit que sa supposée vie rêvée ne la dispense pas, comme tout un chacun, de se sentir mal. Le résultat ne s’est pas fait attendre: 2,5 millions de likes, et près de 23.000 commentaires. Si l’influenceuse aux 50 millions d’abonnés ne cherchait sans doute pas un tel intérêt – elle n’en a pas besoin – force est de constater que ce post a eu bien plus de succès que les précédents, et les suivants.
Les notions de bonheur et d’optimisme ont pris un sacré coup dans l’aile. Ces derniers temps, ce ne sont ni le rire ni le sourire qui créent l’engagement sur Instagram, Snapchat, et autre TikTok, mais les pleurs. Se filmer en gros plan en train de pleurer en raison d’une rupture, d’un décès, ou d’une période angoissante permettrait aux influenceurs et autres célébrités de gagner la sympathie – et les likes – des followers. C’est la définition même, bien que non officielle, du ’sadfishing’. Et plus les déclarations – et émotions négatives – sont exagérées, plus le succès est grand.
C’est à la journaliste Rebecca Reid que l’on attribue le terme ’sadfishing’, et ce dès 2019. Et il ne s’agirait pas tant de mettre en scène sa tristesse, mais de l’accentuer pour susciter un intérêt sur les réseaux sociaux. Adele, Travis Scott, ou encore Kendall Jenner comptent parmi les célébrités qui se sont mises dans une telle situation, alors que nombre d’influenceurs se succèdent aujourd’hui sur ces plateformes pour se dévoiler dans des vidéos toutes plus larmoyantes les unes que les autres.
Tout en contrastes, les réseaux sociaux oscillent aujourd’hui entre un certain idéal de perfection et une quête d’authenticité; le ’sadfishing’ étant censé s’inscrire dans la deuxième catégorie, tel un pied de nez à la première. Et la tendance ne cesse de s’amplifier sur les réseaux sociaux, au point que les hashtags #divorce et #anxiety, qui permettent de retrouver ce type de vidéos, cumulent aujourd’hui plus de 7 et 14 milliards de vues, respectivement.
Et pour ceux qui n’auraient pas les talents nécessaires pour pleurer sur commande, Snapchat propose désormais le filtre ’crying’ qui transforme totalement le visage. Il suffit de l’activer pour que l’utilisateur se voit déformer, version triste à souhait, et plus il rit devant l’écran de son téléphone, plus le filtre fait apparaître son chagrin. Il y a (presque) de quoi en rire.