Mustii consacre «It’s Happening Now» à la maladie mentale de son oncle, décédé lorsqu’il était adolescent
Lorsqu’il était adolescent, Mustii a perdu son oncle, atteint de schizophrénie. Cet événement marquant est le point de départ du second album de l’artiste, «It’s Happening Now». Mustii se glisse dans la peau de son oncle, avec tous les contrastes et toutes les contradictions que cela implique. Au fil de 12 titres qui nous font traverser de nombreuses émotions, on retrouve un artiste qui a beaucoup grandi depuis son premier album.
Vous avez récemment signifié votre tristesse face à la fermeture du secteur culturel. Quelle a été votre ressenti face à ce micmac qui a eu lieu en fin d’année?
Mustii: «J’ai le sentiment que tout le monde est simplement dépassé et que personne ne sait comment gérer cette situation, ce qui provoque ce type de maladresses (NDLR: la fermeture du secteur culturel). Mais c’est sûr que ça a été particulièrement révoltant et cruel en cette période des fêtes, qui est souvent une période très occupée pour les spectacles. Tout le monde est déjà sur les rotules, donc j’ai un peu vécu cela comme la goutte de trop.»
Cette annonce était doublement douloureuse pour vous, étant donné que vous êtes chanteur et acteur. Est-ce que vous dissociez ces différentes carrières ou est-ce que vous estimez plutôt que vous êtes un artiste aux multiples facettes?
«Je me considère comme quelqu’un qui dispose de plusieurs outils aux utilisations bien distinctes. C’est le cas de plus en plus d’artistes, qui se servent de différents médias pour s’exprimer artistiquement. Mon prochain rêve, c’est de réaliser un court-métrage, ce que je fais déjà un petit peu lorsque l’on tourne mes clips.»
Votre carrière d’artiste commence par le théâtre, était-ce une vocation ou avez-vous développé ce goût pour la scène avec le temps?
«Quand j’étais plus jeune, j’étais renfermé et timide, mes parents ont donc décidé de m’inscrire au théâtre. Cela a été une révélation et après deux semaines, j’ai réalisé que je m’épanouissais sur scène et que c’est ce que je voulais faire, même si c’était un milieu dans lequel il est difficile de se projeter.»
Ce côté théâtral se retrouve dans votre musique, particulièrement sur cet album, qui a un côté grandiloquent…
«L’album est à l’image de la vie de mon oncle, à savoir particulièrement contrasté. J’ai essayé de traduire ce contraste musicalement, avec des plages beaucoup plus aériennes, et d’autres beaucoup plus grandiloquentes. L’idée était d’être plus organique et plus rock que par le passé. J’ai toutefois essayé de ne pas être trop binaire, parce que la réalité ne l’était pas. Tout au long des titres, je traverse certains épisodes de sa vie à la façon d’un journal intime, en me mettant à sa place. C’était une façon pour moi de le rencontrer, et j’ai pu effectuer une forme de thérapie.»
Qu’est-ce qui vous a motivé à vous lancer dans ce processus?
«C’est quelque chose que j’avais en tête depuis longtemps, parce que ça m’a marqué en tant qu’adolescent. J’ai toujours eu du mal à comprendre ses façons d’agir et ça a longtemps été une forme de tabou dans ma famille. Il y a deux ou trois ans, je me suis dit qu’en parler, par exemple sur un album, pourrait ouvrir un socle de discussion avec mon père à propos de la schizophrénie. Et depuis lors, on en parle beaucoup plus. Mais globalement, l’album me permet de parler des gens qui se sentent en marge, un thème qui me tient particulièrement à cœur.»
Est-ce qu’on vous verra un jour livrer votre propre journal intime?
«Quelque part, ici je parle de sujets qui m’affectent directement, car je me trouve plein de points communs avec mon oncle. Je n’ai pas de maladie mentale, mais j’ai parfois vécu la même solitude que lui durant l’adolescence. Je me suis également souvent senti en marge de la société. Je trouve donc plus intéressant de me saisir d’un prétexte pour me raconter, plutôt que de focaliser l’attention directement sur moi.»
Pour un homme de scène comme vous, est-ce que l’album ne se concrétisera qu’une fois en concert?
«Il connaîtra une deuxième vie et il prendra une autre dimension sur scène, qui est fait pour se retrouver devant un public. De par son relief, de par son côté plus rock, je vais pouvoir tester plus de choses et j’ai hâte de le présenter.»
Mustii sera en concert le 8 juin à l’Ancienne Belgique.
En quelques lignes
Exit le côté electro et industriel de «21st Century Boy», Mustii revient avec un album beaucoup plus organique et rock avec ce second volet. L’histoire contrastée de son oncle lui permet de tenter des choses nouvelles musicalement, et de varier les styles au fur et à mesure de «It’s Happening Now». Le tout forme malgré cela un ensemble cohérent, et l’évolution avec son premier album est assez fulgurante, alors que ce dernier avait déjà été bien reçu. Ce constat soulève donc une question de taille: où s’arrêtera Mustii? 4/5