Quels sont les impacts des vagues de chaleur à répétition sur notre corps?
Cet été, la Belgique a connu des vagues de chaleur particulièrement intenses. Dans l’immédiat les conséquences les plus fréquentes de l’exposition à des températures élevées sont les coups de chaleur (vertiges, fatigue, nausées…), associés à un risque de décès. Mais les épisodes caniculaires à répétition peuvent également avoir des effets à plus long terme sur le corps humain.
«Il est de plus en plus évident que cela peut avoir des conséquences à plus long terme, notamment le développement d’une maladie rénale chronique», observe Richard Johnson, professeur de médecine à l’université du Colorado, dans les colonnes d’Atlantico. De plus, «des études suggèrent que le stress thermique et le changement climatique pourraient avoir une autre conséquence, à savoir qu’ils pourraient augmenter le risque d’obésité et de diabète.»
La chaleur augmente ces risques via divers mécanismes, explique Richard Johnson. D’abord, parce qu’elle entraîne généralement une réduction de l’activité physique. Ensuite, parce qu’elle va de pair avec la déshydratation. Et de récentes études ont montré qu’une légère déshydratation peut stimuler la production de fructose dans l’organisme. Or, «souvent les gens s’hydratent avec les mauvais types de liquides, notamment les boissons gazeuses, qui contiennent beaucoup de sucre», note ce spécialiste des maladies rénales et de l’hypertension. On a donc une double accumulation de fructose, puisqu’il est présent dans les boissons sucrées. Et ce glucide «est particulièrement efficace pour stimuler l’accumulation de graisse et provoquer une résistance à l’insuline.»
Outre le risque accru de maladie, les effets biologiques les plus directs de la chaleur concernent le système cardiaque. Sous l’effet de la chaleur, le cœur est obligé de pomper davantage, augmentant le rythme cardiaque. Il retrouve son rythme normal une fois que l’air se rafraîchit.
«Le problème c’est quand la canicule dure», indique à LCI Daniel Gagnan chercheur en cardiologie au Centre EPIC de Montréal. «Les canicules les plus destructrices ont été les plus longues et surtout celles où la température ne baissait presque pas la nuit.» Il illustre cela par une expérience récente, qui a démontré que l’exposition répétée à la canicule impacte notre cœur. «Les résultats suggèrent que le stress, le rythme cardiaque, est plus élevé lors de la deuxième exposition.» Autrement dit, ils suggèrent que l’exposition répétée à la chaleur a bel et bien un effet sur notre santé, et pourrait potentiellement impacter notre espérance de vie.
En plus d’impacter le rythme cardiaque, la chaleur peut aussi avoir des conséquences à long terme sur les systèmes respiratoire, endocrinien, immunitaire et nerveux.
Bien sûr, certaines personnes sont plus à risque que d’autres, en particulier les personnes âgées et celles à la santé vulnérable. Toutefois, même les sujets en bonne santé peuvent faire face à ces conséquences de la chaleur.
Les étés sont de plus en plus chauds sous nos latitudes. Cela signifie-t-il que nos corps vont finir par s’adapter à de telles températures? Une étude française a été menée à la suite de la terrible canicule de 2003, qui avait fait 70 000 morts en Europe. Il en ressort qu’en France, la population supporte depuis lors mieux les vagues de chaleur. Faut-il y voir une forme d’adaptation de la part de nos organismes? Pas vraiment.
«Cette adaptation s’explique probablement par des modifications des comportements et par d’autres changements dans notre société, plutôt que par des processus physiologiques», tempère Rémy Slama, directeur de recherche en épidémiologie environnementale à l’Inserm, dans un article publié dans The Conversation. Les mesures de précaution individuelles face à la chaleur sont aujourd’hui entrées dans les usages, de nombreuses villes ont depuis mis au point leur «plan canicule», les citoyens investissent de plus en plus pour combattre la chaleur (systèmes de climatisation, d’isolation…).
En conclusion, cette adaptation «ne signifie pas que les sociétés sont ou seront capables de compenser intégralement les effets du changement climatique passant par une augmentation de la fréquence des canicules; surtout, il est très probable qu’elles ne le pourront pas toutes», pointe le chercheur. À l’heure où les canicules ne seront que plus fréquentes, si notre organisme ne s’adapte pas, ce sont donc nos modes de vie et nos villes qu’il est urgent de rendre plus résilients à la chaleur.