Son mari de 43 ans souffre d’aphasie: elle livre un témoignage bouleversant sur cette maladie
L’annonce de la fin de la carrière de Bruce Willis, atteint d’aphasie, a braqué les projecteurs sur ce trouble du langage peu connu du grand public, bien qu’il touche de nombreuses personnes.
La gifle de Will Smith à Chris Rock aura eu le mérite de mettre en avant l’alopécie dont souffre Jada Pinkett-Smith. Quelques jours plus tard, avec l’annonce de la fin de la carrière de Bruce Willis, c’est une autre maladie méconnue qui a été mise en lumière: l’aphasie.
Sur Twitter, EliseV, une illustratrice française, a livré un témoignage bouleversant. Il y a sept mois, son mari âgé de 43 ans a fait un AVC ischémique (une artère du cerveau qui s’est bouchée). «Depuis, après 15 jours de coma artificiel, 1 mois et demi de réa neurologique, il est aphasique», confie-t-elle.
Son mari «jargonne»
«Il y a plusieurs types d’aphasie (…) Mon mari, lui, ‘jargonne’. Jargonner, c’est remplacer les mots par des sons qui n’ont pas de sens. Par exemple, pour dire ‘Le nom du chien! Au pied!’, il va dire ‘Trimimi! Tromomo!’. En vrai parfois c’est drôle. Surtout quand cet idiot de chien comprend quand même et revient au pied. Ce «trimimi», c’est un «mot doudou», c’est un son facile à produire pour mon mari, et qu’il utilise tout le temps», explique Elise.
Depuis cinq mois, son mari travaille avec une orthophoniste. Elle constate beaucoup de progrès. «Grâce à leur travail commun, mon mari récupère du vocabulaire, doucement, chaque jour. J’ai assisté à quelques séances, et j’y ai vu beaucoup de bienveillance… Mais le souci du jargonnage, c’est que c’est dur de le bloquer complètement. Quand il a envie de raconter quelque chose, mon mari enchaîne les «trimimi tromomo apremonmon tremi apipi mamon» à toute vitesse, et là, impossible de le suivre!», poursuit-elle.
Des alternatives au langage
«Alors on a du bol: on est très très proches tous les deux, et je le comprends généralement bien. Le langage non verbal aide beaucoup, je m’appuie sur ses intonations, ses mimiques et ses gestes pour le comprendre. On s’aide aussi d’une tablette blanche pour échanger, car les mots-clés lui reviennent plus facilement à l’écrit qu’à l’oral, et il lui arrive de me dessiner un objet, de faire le plan d’une pièce… Et puis j’essaie de poser des questions fermées: je ne demande pas «tu veux manger quoi ce soir?» mais «tu veux manger tel truc ce soir?» (oui/non)», confie l’utilisatrice sur Twitter.
«L’aphasie touche chaque aspect de la vie»
L’aphasie de son mari ne touche pas seulement le langage. Depuis son AVC, il a également des difficultés à lire. «Je vous disais que l’aphasie est un trouble de la parole et/ou de la compréhension, et ça peut toucher sa capacité à lire, à écrire… Mon mari ne peut lire que des phrases simples (sujet/verbe/complément) et correctement ponctuées. (…) Mais bref, l’aphasie touche chaque aspect de la vie. Et ça peut être une vraie galère…».
Des réactions pointées du doigt
Enfin, EliseV a regretté l’attitude de certaines personnes face à cette maladie. «Dans les trucs pas drôles, il y a aussi les gens qui lui parlent fort fort (il n’est pas sourd bordel), ceux qui lui parlent comme s’il avait 3 ans (il n’est pas devenu idiot), ceux qui ne lui parlent plus directement mais me demandent de ‘lui dire que’ (il t’entend ducon). Et si un jour, lecteurs commerçants, quelqu’un vous tend un papier écrit ‘Je suis aphasique, je ne peux pas vous dire ce que je veux mais je peux vous répondre si vous me proposez des choses’, prenez un instant pour cette personne… Cet exercice sera plus difficile pour elle que pour vous, car il en faut, du courage, pour aller acheter quelque chose sans les mots pour s’exprimer…», détaille-t-elle.
Elise a conclu ce long et bouleversant thread sur Twitter en adressant quelques mots à son mari: «A mon amoureux: Je t’admire. Je serai toujours là. Je t’aime».