The Gilded Age, une série historique très riche sur la haute société new-yorkaise de 1882

De Downton Abbey à The Gilded Age: rencontre avec le réalisateur Julian Fellowes.

par
Ruben Nollet
Temps de lecture 4 min.

Le nom de Julian Fellowes ne vous dit peut-être pas grand-chose, mais à 72 ans, le scénariste et réalisateur britannique est un phénomène. Cette réputation, il la doit notamment à sa série à succès ‘Downton Abbey’ qui, après 6 saisons, fera bientôt l’objet d’un second long-métrage. Le voilà aujourd’hui avec un autre petit bijou: ‘The Gilded Age’, une série historique très riche sur la haute société new-yorkaise de 1882. Quelques explications.

Quel est le rapport entre ‘The Gilded Age’ et ‘Downton Abbey’?

Julian Fellowes: «Elles sont à l’opposé. ‘Downton Abbey’ parle du déclin d’une famille aristocratique britannique, qui doit accepter sa perte d’influence et a tout d’un coup des soucis financiers. ‘The Gilded Age’ est le contraire. Il s’agit de la naissance de la nouvelle Amérique, de gens qui ne prennent plus pour exemple la vieille aristocratie européenne, mais optent pour l’American Way. Ils font fortune avec leurs industries et cela leur donne une confiance inébranlable. Il s’en dégage une énergie que je trouve très attrayante.»

La série montre aussi les conflits entre ces nouveaux riches et les familles américaines bien établies. Qu’en était-il?

«Dans la seconde moitié du 19e siècle, toutes sortes de gens ayant bâti leur fortune aux quatre coins de l’Amérique ont tout d’un coup déménagé à New York. Certains devaient d’ailleurs leur richesse à la guerre de Sécession. Et ils arrivaient à New York avec leur propre façon de penser, qui était différente des idées de la vieille bourgeoisie. C’est la dynamique de la série.»

Ce qui lie aussi les deux séries, c’est qu’elles se passent à des époques de grands changements. Qu’est-ce qui vous attire là-dedans?

«Cela met les personnages sous pression, ce qui est toujours un point de départ intéressant. Ils doivent apprendre à vivre avec le fait que le monde qu’ils ont toujours connu n’est plus le même. Je trouve que c’est un contexte intéressant. Le changement dans ‘The Gilded Age’ est d’ailleurs très reconnaissable, car cette attitude américaine par rapport à la richesse existe toujours. Le cliché de l’Américain arrogant qui agite ses dollars et achète tout ce qu’il voit est né là.»

Le ton de ‘The Gilded Age’ est tout de même différent de celui de ‘Downtown Abbey’…

«En effet. ‘Downton Abbey’ est de manière générale une histoire chaleureuse, presque tendre. ‘The Gilded Age’ est plus corrosif et sombre. Ce sont des personnages aux fortes ambitions. Ils se battent pour ce qu’ils veulent. Même si je ne peux m’empêcher d’y ajouter à nouveau des vieilles dames rigolotes.» (rires)

Dans les deux séries, on voit aussi le monde des domestiques, un monde très différent dans ‘The Gilded Age’?

«La grande différence, c’est que ces domestiques sont presque tous des immigrés ici. Les Américains n’étaient pas très attirés par ces emplois de domestiques. Mais c’était en revanche le moyen idéal pour de nouveaux venus de se faire engager, il y avait toujours de la demande. Nous avons donc un cuisinier allemand, une bonne irlandaise, etc. Tout cela est authentique.»

Par où commence-t-on avec une histoire d’une telle envergure?

«Je ne devais pas commencer de zéro, car cela fait très longtemps que je m’intéresse à cette période de l’histoire, que je lis des livres sur le sujet. Il faut lire énormément. Les romans d’Edith Wharton surtout permettaient de bien comprendre la façon dont fonctionnait ce monde. La vie de ces gens me fascine, et on retrouve encore leurs traces aujourd’hui. Beaucoup de ces immenses demeures sont toujours là. Celle de la famille Russell dans la série, par exemple, est inspirée de la James B. Duke House sur la 5e avenue. Si vous passez devant, vous pouvez facilement imaginer ces personnages en sortir par la porte d’entrée. À la longue, vous êtes comme aspiré dans leur monde. J’avais le sentiment d’en faire partie. J’y pensais dans ma voiture et dans mon bain. Et à un moment donné, vous sentez que les personnages sont prêts à parler. C’est un peu ma méthode.»

Notre critique de The Gilded Age:

New York, 1882. Sur la 5e avenue, à deux pas de Central Park qui vient d’être aménagé, George Russell a fait construire un imposant manoir. Magnat des chemins de fer – et business man implacable – il dispose d’une immense fortune et il en met plein la vue à sa voisine d’en face, Agnes van Rhijn. Celle-ci appartient à une influente famille américaine d’origine néerlandaise, et comme les autres dames de la haute société, elle n’a pas l’intention d’accepter ces nouveaux riches peu distingués. Comme peut le constater Madame Russell. ‘The Gilded Age’ est une histoire de guerre, même si ce conflit se joue en robes somptueuses, dans des décors impressionnants et à coups de poignards. Après ‘Downton Abbey’, le scénariste Julian Fellowes crée à nouveau un ensemble foisonnant, éclairant et très divertissant de personnages, d’événements et d’intrigues. Un regard addictif sur le monde, comme on a pu le voir dans des films tels ‘The Age of Innocence’, avec d’excellents acteurs et des dialogues souvent acérés.(rn) 4/5