Ernest, un pompier présent à Uvalde après la tuerie, raconte l’horreur: «C’était une scène tragique»
Ernest, un pompier présent sur les lieux du terrible drame au Texas, a vu des familles en détresse, qui se précipitaient vers la scène dramatique pour voir si leur enfant était vivant.
Accablées de chagrin, des centaines de personnes se sont rassemblées pour pleurer les 19 enfants et les deux enseignantes victimes d’un effroyable massacre dans leur école d’Uvalde, au Texas, commis par un jeune homme de 18 ans à l’aide d’un fusil d’assaut acheté légalement.
La tragédie, qui repose l’éternelle question de la limitation des armes à feu aux États-Unis, a assommé de douleur cette petite ville de 16.000 habitants en majorité hispaniques. Un millier de personnes se sont réunies mercredi soir pour une veillée dans une salle de rodéo d’Uvalde.
«J’ai le cœur brisé», sanglote Ryan Ramirez, qui a perdu sa fille Alithia, 10 ans, lors de la tuerie. À ses côtés, son épouse Jessica pleure doucement, leur autre fille dans les bras.
«Plus jamais heureux»
«Elle était une très bonne artiste» et aspirait à la grandeur, raconte M. Ramirez en feuilletant un portfolio des peintures colorées d’Alithia et des cartes d’anniversaire qu’elle dessinait pour sa mère. «Ma fille aurait voulu que toutes les personnes touchées soient fortes, qu’elles restent unies. C’est ce que nous essayons de faire».
Esmeralda Bravo, pour sa part, tient une photo de Nevaeh, sa petite-fille décédée. «Il n’y a pas d’explication», dit-elle. «C’était une bonne petite fille, très timide et très jolie. (…) Avoir le soutien de la communauté compte beaucoup pour moi, mais je préférerais que ma petite fille soit ici à mes côtés».
«Mon petit amour vole maintenant haut dans le ciel avec les anges au dessus», a écrit sur Facebook Angel Garza, dont la fille Amerie Jo venait juste de fêter son dixième anniversaire. «Je t’aime Amerie Jo», a-t-il ajouté. «Je ne serai plus jamais heureux ou plus jamais comme avant.»
Un pompier décrit l’horreur
Ernest «Chip» King, un pompier qui s’est rendu à l’école primaire Robb, a expliqué au New York Post qu’il entendait encore des coups de feu quand les volontaires se sont précipités sur la scène qu’il qualifie de «chaotique», où les parents tentaient tant bien que mal de rejoindre leurs enfants. «Il y a certaines zones où vous pouvez entendre les coups de feu et nous avons évidemment entendu que l’activité était très fluide sur les radios et nous avons écouté cela tout le temps», a-t-il expliqué.
King a déclaré que la scène d’effroi montrait des parents courir vers l’école pour voir si leur enfant était encore en vie, après ce terrible massacre. Les premiers intervenants essayaient d’empêcher les parents d’atteindre l’école, afin de permettre aux responsables de prendre en compte chaque élève. «De toute évidence, la situation était extrêmement chaotique au début et je ne dirais pas qu’elle a été maîtrisée assez rapidement, mais beaucoup de familles essayaient d’entrer, de trouver leur enfant», a ajouté le pompier.
«J’ai entendu, je n’ai pas vu, j’ai entendu des pères de famille briser des fenêtres et tirer leurs enfants par les fenêtres. C’était une scène terrible, tragique», explique encore King.
Détails troublants
Des détails troublants n’ont cessé d’apparaître depuis la tuerie. S’adressant aux journalistes, le gouverneur du Texas Greg Abbott a révélé que le meurtrier, Salvador Ramos, qui a été tué par la police, avait tiré sur sa grand-mère de 66 ans en plein visage avant de se rendre à l’école primaire Robb.
Le jeune homme n’avait pas d’antécédent judiciaire chez les mineurs ou de problèmes psychologiques connus des services de santé locaux, avait précisé le gouverneur, le qualifiant pourtant de «dément».
Le tueur avait auparavant annoncé sur Facebook son intention d’attaquer sa grand-mère laquelle, bien que grièvement blessée, a réussi à alerter la police.
Il a ensuite publié un nouveau message pour dire qu’il l’avait fait. Puis, au moins 15 minutes avant le massacre, un troisième pour faire savoir que sa prochaine cible était une école. Il s’y est rendu vêtu d’un gilet pare-balles et d’un AR-15, version civile d’un fusil d’assaut militaire conçu pour faire le plus de victimes possible en un temps record.
Des échanges de tirs avec la police
Les forces de l’ordre ont tenté de l’empêcher d’entrer dans l’école, mais après un échange de coups de feu, il est parvenu à se barricader dans une salle de classe. Outre les 21 morts, la tragédie a fait 17 blessés.
Aux États-Unis, les fusillades en milieu scolaire sont un fléau récurrent que les gouvernements successifs ont jusqu’à présent été impuissants à endiguer.
Le débat sur la régulation des armes à feu dans le pays tourne pratiquement à vide, étant donné l’absence d’espoir d’une adoption par le Congrès d’une loi nationale ambitieuse sur la question.
«Je suis triste et en colère contre notre gouvernement qui n’en fait pas assez pour limiter l’accès aux armes», fustige Rosie Buantel, une habitante d’Uvalde, à la sortie de la messe mercredi. «Nous avons vécu cela trop de fois, et rien n’est fait», assène cette quinquagénaire.
Responsabilités politiques
Signe de la tension autour du sujet, la conférence de presse du gouverneur Greg Abbott, un républicain, a été interrompue par son opposant Beto O’Rourke, qui l’a accusé d’avoir sa part de «responsabilité».
«Vous dites que cela n’était pas prévisible, c’était complètement prévisible à partir du moment où vous avez décidé de ne rien faire», a déclaré cette figure du parti démocrate au Texas.
Le président Joe Biden a annoncé mercredi qu’il se rendrait dans cet État avec son épouse «dans les prochains jours».
La veille, il avait livré une allocution émue depuis la Maison Blanche, appelant à «transformer la douleur en action».
«Quand, pour l’amour de Dieu, allons-nous affronter le lobby des armes?», avait-il lancé, se disant «écœuré et fatigué» face à la litanie des fusillades en milieu scolaire.
Le puissant lobby pro-armes, la NRA, s’est dédouané mercredi de toute responsabilité, dénonçant «l’acte d’un criminel isolé et dérangé».
«Je considère que cette personne était le mal absolu», a déclaré pour sa part M. Abbott, exprimant une position courante chez les républicains américains, à savoir que l’accès illimité aux armes n’est pas en cause dans l’épidémie de violence qui frappe le pays.
Il s’agit d’une des pires tueries de ces dernières années aux États-Unis.
Le jeune meurtrier, de nationalité américaine, s’était tout récemment acheté deux fusils d’assaut et 375 cartouches, juste après son 18e anniversaire.
Le fusil AR-15, arme extrêmement létale, est funestement connu pour avoir déjà été utilisé dans d’autres fusillades aux lourds bilans, comme la tuerie en 2018 dans un lycée de Parkland en Floride, qui avait fait 17 morts, dont une majorité d’adolescents.
Un ancien ami du tireur, Santos Valdez, a confié au Washington Post que Salvador Ramos avait été harcelé enfant à cause d’un défaut d’élocution, et qu’il s’était un jour entaillé le visage «juste pour s’amuser».