Pourquoi afficher des portraits d’enfants photographiés à l’étranger peut-il poser problème?
Qui n’a jamais profité d’un voyage à l’étranger pour prendre des photos d’enfants dans leurs quotidiens? Cette pratique, qui offre souvent de superbes clichés, pose question à de nombreux niveaux, et une enquête menée par Slate relève ceux-ci.
Il y a quelque temps, le média Slate s’était penché sur la proportion de clichés d’enfants dans l’appareil photo des touristes en fonction de leur nationalité. Le tableau qu’ils ont dressé est édifiant, puisque l’enfant occidental n’est jamais ou presque photographié, alors que l’enfant africain ou asiatique constitue un pourcentage important des clichés issus des appareils photos français.
Au-delà de la quantité, la façon de photographier est également différente: au plus un pays est occidentalisé est riche, au plus les précautions seront prises par rapport aux enfants. Le site web français s’interroge par exemple sur la légende d’une voyageuse, qui explique, en légende de son album «Sourires d’enfants népalais»: «Je voudrais partager avec vous ces sourires, une joie de vivre communicative qui vous fera le plus grand bien.» Quel est le message derrière cette phrase? Que malgré la misère, les enfants népalais sont plus heureux? Qu’ils nous permettent, à nous Occidentaux, d’être de bonne humeur?
Un tourisme un peu malsain?
Dans une chronique, l’humoriste marina Rollman avait, il y a un moment, ironisé: «Aller vers les quartiers populaires alors que tu n’en viens pas, aller vers des quartiers d’immigrés alors que t’es né blanc en Europe occidentale, est-ce que c’est pas un tourisme un peu malsain? Une fois par an, j’ai des potes qui reviennent de voyage et quand ils me montrent les photos, dans le tas, y a forcément un ou deux portraits de gamins cambodgiens tout sourire face caméra avec des maillots de foot un peu pourris. Chaque fois, j’ai envie de leur dire: et toi ça te ferait plaisir si tes gosses étaient en photo dans la cuisine d’un connard à Phnom Penh?»
De fait, la question du droit à l’image est centrale dans ce contexte et, si cette notion est connue et respectée de tous (ou presque) chez nous, elle existe aussi de l’autre côté du globe sans qu’on lui prête la moindre attention. Certaines associations, comme le mouvement ChildSafe, militent donc contre ce type de pratiques, et invitent à ne pas céder au tourisme de la misère. «Les enfants ne sont pas des attractions touristiques», clame une de ses campagnes.