Une experte estime que la guerre en Ukraine est avant tout «une guerre entre la Russie et l’Europe»
La guerre qui se joue actuellement en Ukraine n’est pas une guerre entre la Russie et l’Ukraine, mais entre la Russie et l’Europe avec l’Ukraine qui prend tous les coups, a souligné auprès de Belga Laetitia Spetschinsky, titulaire de la chaire UE-Russie à l’UCLouvain.
Selon elle, le risque d’escalade ne peut être écarté sur le Vieux Continent, notamment dans les pays baltes, situés à proximité immédiate de la Russie et où des militaires de l’Otan sont déployés.
Trois jours après avoir reconnu l’indépendance des territoires séparatistes ukrainiens du Donbass et fait valider mardi une intervention par le Parlement russe, Vladimir Poutine a annoncé jeudi à l’aube le début des hostilités, avec frappes aériennes et entrée de soldats depuis plusieurs endroits.
Une cohésion très forte
D’un point de vue politique, la «cohésion au sein de l’Union européenne et de l’Otan n’a jamais été aussi forte face à la brutalité russe», observe Mme Spetschinsky. «Tous les yeux sont actuellement rivés sur la guerre conventionnelle et le déploiement des chars et des avions à l’est de l’Ukraine».
Par contre, il n’y a que trop peu d’attention portée au risque de déstabilisation économique, qui est «gigantesque», selon l’experte. Les prix de l’énergie étaient déjà très volatiles en pleine relance de l’économie après deux années de pandémie. «On assiste aujourd’hui à une nouvelle flambée des prix de l’énergie due à la panique sur les marchés. Cette augmentation va être répercutée sur tous les biens de consommation et de surcroît, il va y avoir une déstabilisation du prix des denrées alimentaires», met-elle en garde.
Un soutien financier
«Qui plus est, face à la menace russe, les Etats membres de l’UE vont très probablement augmenter leur budget Défense afin d’assurer leur sécurité, ce qui va grever encore un peu plus les finances. Sans oublier les diverses aides pour l’Ukraine qui viendront s’ajouter», abonde-t-elle. L’UE a ainsi dernièrement renforcé son soutien financier à l’Ukraine à hauteur d’1,2 milliard d’euros. Les Etats membres pourraient également débloquer des aides bilatérales, souligne-t-elle.
Pour cette spécialiste de la Russie et de l’Ukraine notamment, c’est le début d’une nouvelle ère. «Les Nations Unies (dont la Russie est un des cinq membres permanents, NDLR) sont déchirées. La situation est critique alors que la Russie préside cette année le Conseil de Sécurité», explique-t-elle. «L’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), qui est la seule organisation internationale au sein de laquelle la Russie interagit avec les partenaires européens, est suspendue au retour à la table des négociations de Vladimir Poutine. Les schémas diplomatiques de dialogue qui existaient sont complètement mis sous tension. La confiance est rompue entre partenaire et l’agresseur tout désigné», conclut-elle.