Quésaco : après les "backpackers", qui sont les "begpackers" ?
Si les campagnes de financement participatif sont une solution pour des voyageurs en quête de sens qui ont besoin de donateurs pour concrétiser un tour du monde à vélo ou un autre itinéraire riche en valeurs humaines, les "begpackers" ont beaucoup moins d'éthique quand ils font la manche en Asie pour obtenir l'argent nécessaire à leur périple. On vous explique ce phénomène, disons, glauque.
D'après les chiffres de l'OCDE, l'Asie réunit les deux tiers de la population pauvre dans le monde, soit plus de 800 millions de personnes vivant avec moins de 1,25 dollar par jour ainsi que 1,7 milliard vivant avec moins de deux dollars. A l'été 2021, une étude de la Banque Asiatique de Développement soulignait les conséquences dramatiques de la crise sanitaire : la pandémie a poussé 75 à 80 millions de personnes dans l'extrême pauvreté en 2020, c'est-à-dire vivant avec moins de 1,90 dollar quotidien. Alors, quand des Occidentaux font la manche sur les trottoirs de Bangkok, cela fait... tâche !
Dans un article publié récemment, CNN révèle le retour de touristes qui n'ont aucun scrupule à financer leur voyage en quémandant quelques pièces de monnaie. C'est un expatrié à Hong Kong, tenant un compte Instagram pour raconter sa vie d'étranger, qui rapporte la présence de ce profil de visiteurs, plutôt hors norme. Sur sa page, Chaotic Hong Kong Expats publie une photo surtitrée "la nature est guérie, les "begpackers" sont de retour".
Ce mot-valise est un néologisme combinant le verbe "beg" en anglais, c'est-à-dire mendier, et "packers" en référence aux voyageurs qui parcourent un pays ou le monde à l'aide d'un simple sac à dos. Ceux-là, on les appelle des "backpackers". Ce sont ces jeunes baroudeurs que l'on surnomme ainsi, surtout en Australie, parce qu'ils visitent le pays-continent au cours d'un périple de plusieurs mois, voire d'une année, multipliant les petits boulots et avalant les kilomètres.
Made in Asia
Dans le cas des "begpackers", qui ne seraient visiblement présents qu'en Asie, leur motivation est complètement différente. Le média américain précise que certains vendent des bijoux ou un tressage de cheveux, d'autres jouent de la musique tandis que certains attendent que la monnaie tombe sans rien faire. La mendicité est pourtant bel et bien interdite en Thaïlande, en Inde ou en Indonésie. C'est donc à leurs risques et périls que ces touristes mendiants tentent d'obtenir un voyage tous frais payés. En Thaïlande par exemple, la mendicité qu'elle soit directe ou indirecte est punie d'une amende d'au moins 250 euros et potentiellement d'un an de prison. A l'automne dernier, le portail d'informations Toute la Thaïlande avait déjà repéré le phénomène. Divers blogueurs spécialisés dans le voyage ont eux aussi croisé le chemin de ces touristes mendiants, qui proposent parfois des câlins gratuits.
En 2017 déjà, Le Monde avait mis au grand jour cette pratique qui surprend les locaux. Le quotidien français l'avait surnommé "le dernier-né du tourisme sans gêne". Hormis l'indécence de ces voyageurs de demander à la rue qu'elle finance leur voyage alors que la population locale rencontre des difficultés pour se nourrir, ce phénomène est d'autant plus discutable que les Occidentaux disposent de passeports suffisamment puissants pour franchir les frontières de nombreux pays, en comparaison à des nationalités du reste du monde, sans fournir de gros efforts au niveau administratif. Sur CNN, un avocat philippin résume cette réalité en l'indiquant comme un "privilège du passeport".
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