Les sex dolls, compagnes de vie idéales? «Tous les jours je les prends dans mes bras, je les câline. C’est de l’amour»
Le marché des «sex dolls» est en plein boom. De plus en plus de clients se tournent vers ces compagnes sexuelles pour assouvir leurs fantasmes ou remédier à leur misère affective.
Jeanne C. Desbuleux et Johannes Fuss, deux chercheurs de l’université de Duisbourg et Essen, se sont penchés sur les rapports qu’entretiennent 217 propriétaires de «sex dolls», majoritairement des hommes hétérosexuels, avec ces poupées sexuelles. Ils leur ont demandé de répondre à un questionnaire détaillé sur l’utilisation qu’ils en font, et sur la vision qu’ils ont de ces femmes-objets au réalisme de plus en plus poussée.
La compagne de vie idéale
Près de la moitié des répondants disent être attachés à leur «sex doll» et voir en elle la compagne de vie idéale. Ils sont également plus susceptibles d’être d’accord avec des affirmations telles que «je suis amoureux de ma poupée», «avoir une poupée sexuelle a amélioré ma santé mentale» et «j’utilise des poupées parce que je trouve le corps de mes partenaires sexuels humains potentiels moins attrayant».
Force est de constater que ces poupées siliconées ne sont pas que de simples objets pornographiques, à l’instar des sextoys. Elles sont une consolation face à la solitude, comme l’avait expliqué Yuri Tolochko, l’heureux propriétaire de deux «sex dolls», à ETX Daily Up. «Ça m’arrive de leur parler, on communique. Tous les jours je les prends dans mes bras, je les câline. C’est mon rituel. C’est de l’amour».
Yuri est loin d’être un cas isolé. «Nous avons été étonnés par le nombre élevé de personnes qui semblent vivre réellement une sorte de relation avec ces poupées», a expliqué Jeanne C. Desbuleux au magazine PsyPost. Sans grande surprise, ces individus sont majoritairement célibataires ou divorcés, comme Yuri.
Contrairement à ce qu’affirment leurs détracteurs, les poupées gonflables n’ont pas vocation à remplacer les femmes en chair et en os. Même si leur apparence peut laisser penser le contraire. Couleur des yeux, forme du visage, longueur des cheveux, taille de la vulve, pilosité du pubis… L’attrait des «sex dolls» réside dans le fait qu’elles sont personnalisables à souhait, dans les limites de ce qu’autorise la loi. Amazon a ainsi été jugé en mai dernier dans le cadre d’une comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC), pour avoir rendu possible la vente sur son site de poupées à l’effigie d’enfant.
Créer le partenaire parfait qui réponde – presque – à toutes nos attentes physiques et sexuelles, cela peut faire rêver. Mais cela soulève des questions concernant le consentement et l’objectivation des femmes. La plupart des participants de l’étude (70%) déclarent que les poupées sexuelles n’ont pas changé leur image de la gent féminine, contre 2,3% qui affirment qu’elles ont eu un impact négatif. Toutefois, 10% des répondants disent moins s’intéresser aux «vraies» femmes depuis qu’ils se servent de «sex dolls».
«Les poupées permettent de satisfaire des besoins sexuels et émotionnels bien plus nombreux»
«Ces poupées n’intéressent pas seulement les hommes qui souhaitent se livrer à des comportements (sexuels) potentiellement dangereux, comme le craignent de nombreux détracteurs», a souligné Mme Desbuleux à PsyPost. «Les données montrent que les poupées permettent de satisfaire des besoins sexuels et émotionnels bien plus nombreux. Il se pourrait que les relations sexuelles et émotionnelles avec des objets comme les robots augmentent en raison de la technologisation croissante [de notre société]».