Est-il facile de changer de sexe en Belgique?
Selon une estimation de l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes, il y a environ 55.000 personnes transgenres dans notre pays. Il est donc clair que pour de nombreuses personnes, leur identité de genre ne correspond pas encore à ce qui est indiqué sur leur passeport ou leur carte d’identité.
Qu’elle soit sociale, légale et/ou médicale, chaque transition est unique. Il y a autant de parcours que d’individualités. Mais pour obtenir ce qui nous convient vraiment, ce n’est pas forcément une promenade de santé, même en Belgique. Cela requiert une charge administrative, des coûts, et surtout, cela demande beaucoup de temps et de patience.
Passer du «M» au «F» ou inversement sur sa carte d’identité a récemment été simplifié en Belgique, en retirant, enfin, les conditions médicales. Ainsi, depuis le 1er janvier 2018, les résidents de notre pays ont la possibilité de faire modifier le sexe sur leur passeport en faisant deux déclarations à l’officier d’état civil de leur commune.
La première atteste de la «conviction intime que, depuis un certain temps déjà, le sexe mentionné sur l’acte de naissance ne correspond à son identité de genre vécue intimement» et de la volonté de modifier l’enregistrement de son sexe. L’officier prend acte de cette déclaration et le dossier est envoyé au procureur du Roi qui rendra son avis dans les trois mois.
Il faut ensuite se représenter auprès de l’officier de l’état civil (au plus tôt trois mois et au plus tard six mois après la première déclaration) et remettre une seconde déclaration confirmant sa conviction antérieure. Ce document assure en outre que le demandeur est conscient du caractère irrévocable de la procédure.
Pour une personne mineure, il faut avoir minimum 16 ans, l’accord des deux parents ainsi qu’une attestation d’un pédopsychiatre.
Ces dernières années, plus de 3.200 Belges ont effectué un changement de sexe administratif (dont 530 en 2021). Mais pour beaucoup, le fait de devoir encore choisir entre le «M» et le «F», et donc d’opérer un choix binaire, reste un obstacle.
Une lacune dans la loi, reconnue d’ailleurs par la Cour Constitutionnelle, à laquelle le législateur devra remédier (les mentions M-F-X étant d’ailleurs de plus en plus répandues, en ce compris dans les offres d’emploi publiques).
C’est également à la commune que l’on peut franchir une grande étape, celle de choisir un prénom qui nous correspond.
La demande, introduite auprès de l’officier de l’état civil, doit comprendre: les modifications précises souhaitées pour son/ses prénoms (et ce que l’on fait des autres), un extrait du casier judiciaire, ainsi qu’une déclaration sur l’honneur attestant de «la conviction que le sexe mentionné dans son acte de naissance ne correspond pas à son identité de genre vécue intimement», le ou les prénoms choisis devant être conformes à cette conviction.
Le coût de la procédure varie selon les communes, mais, dans le cas d’une personne transgenre, la redevance ne peut excéder plus de 10% du tarif ordinaire fixé par la commune pour un changement de prénom.
Le changement de prénom est accessible dès 12 ans, mais les mineurs doivent avoir l’accord des deux parents.
En Belgique, aucune loi ne régit les aspects médicaux de la transition (traitement par hormonothérapie et opérations chirurgicales notamment).
Sur l’entièreté de notre pays, seuls l’UZ Gent et l’hôpital de Liège relèvent de la convention «soin transgenre». Ce sont les seuls établissements où les séances avec un psychologue et les bloqueurs de puberté sont largement remboursés. Ces deux «Gender teams» rassemblent des psychologues, psychiatres, endocrinologues, chirurgiens… En 2019, ils inauguraient également des consultations spécialisées pour les enfants et adolescents.
Malgré ces centres spécialisés, les personnes qui envisagent de changer de sexe en Belgique se retrouvent bien souvent sur des listes d’attente interminables. En moyenne, ils doivent attendre quinze mois avant la première rencontre avec un psychologue!
Le nouveau plan d’action LGBTQI+ du gouvernement fédéral promet de rendre les soins aux transgenres plus accessibles. Mais selon Petra De Sutter, il n’est pas assez concret: «Il faut plus de centres spécialisés, répartis dans tout le pays», plaidait dans De Morgen la vice-première ministre.