Procès des attentats à Bruxelles: le jury populaire, une bonne idée?
Le procès des attentats de Bruxelles vient de se terminer. La Belgique a fait le choix du jury populaire, contrairement à la France qui a composé sa cour d’assises de magistrats professionnels. Le choix belge est-il le bon choix?
Le choix belge, opposé à celui de la cour d’assises spéciale en France, composée de magistrats professionnels, qui a jugé les attentats à Paris du 13 novembre 2015, était « le bon choix », explique, parexemple, La Libre Belgique.
«Face aux terroristes qui s’en prennent gravement à un pays en tuant, en déstabilisant et en intimidant sa population et ses représentants, il fallait une réponse à la hauteur de l’enjeu. Qui mieux que des personnes tirées «au hasard» pour juger des islamistes qui s’en sont pris à des personnes «au hasard»? La cour d’assises a offert à la société, et non à des magistrats professionnels, le droit et le devoir de juger ceux qui s’attaquent à la civilité de notre société et aux valeurs européennes», écrit le quotidien, avant de poursuivre: «Pour les victimes et leurs proches, le choix du jury populaire est important aussi. Il leur permet, notamment, de témoigner, de voir l’intérêt et l’émotion dans le regard des jurés, et de se sentir écoutés et entendus. (…) Quand les faits sont gravissimes, que la vérité judiciaire soit prononcée par des citoyens offre une dimension supplémentaire: une réponse et une condamnation des actes par la société elle-même.»
Pleinement concernés
«Tout au long du procès, le jury populaire a démontré qu’il n’était pas «des buses». D’un bout à l’autre, on a ressenti que chacun de ces jurés était pleinement concerné par la mission qu’il avait finalement acceptée. Car ils auraient pu se débiner, ils auraient pu produire un certificat médical bidon. Mais ils ne l’ont pas fait… Les 18 derniers jours ont démontré que ce jury populaire était de qualité, consciencieux et concerné par le sort des dix accusés et par la justice qu’ils doivent rendre pour les victimes et pour la société», lit-on ainsi dans L’Avenir.
Malgré les nombreuses tuiles qui sont tombées sur la cour d’assises de Bruxelles avant et durant les sept mois de procès (échec de la correctionnalisation des faits, demandée avec insistance par le parquet fédéral; conflit larvé entre parquet, cour et SPF Justice autour de l’organisation du procès avec, en point d’orgue, le démontage des box des accusés; lutte des avocats de la défense et de leurs clients pour une fouille des détenus à nu sans génuflexions, décès soudain de Sébastien Courtoy, l’avocat de l’accusé Smaïl Farisi, etc.), la justice tourne, se félicite L’Echo.
Un pacte démocratique
«Malgré des mois de retard et des hoquets, le procès, le plus long de l’histoire du pays, s’est tenu, vaille que vaille, et a offert aux observateurs une nouvelle preuve que la justice pénale est un élément central du pacte démocratique. Les éléments du dossier ont été présentés à la lumière du jour, exposés, soupesés, discutés. Voici la magie de la cour d’assises: les débats y sont oraux, pas écrits, accessibles et contestables par tous, qu’ils soient puissants ou misérables», relève le quotidien économique et financier, pointant également le calme et la constance de la présidente de la cour d’assises, Laurence Massart.
Un modèle
Il ne s’agit ni plus ni moins que d’un « procès de haut vol qui rend justice à la justice », résume Le Soir. Il «restera comme un modèle du genre. La capacité qu’a la justice à s’affranchir de l’émotion suscitée par l’abject pour soupeser les responsabilités fait aussi la grandeur et la force d’une démocratie.»
Par rapport à la cour d’assises de Paris, «Bruxelles n’a pas à rougir des mois qui viennent de s’écouler», estime Le Soir. «Au terme des débats, bien des questions restent sans réponse. L’une d’elles est fondamentale: avons-nous compris? Avons-nous compris pourquoi des hommes qui ont grandi parmi nous se sont transformés en tueurs aveugles? Cette interrogation-là n’a pas fini de nous tarauder. Elle n’a pas de réponse simple. Mais avoir pris le pari de l’exposer à travers le débat public comme vient de le faire ce procès fait partie d’une catharsis inévitable, civilisationnelle, qui grandit ceux qui misent sur l’homme et l’avenir.»
Une expérience humaine hors norme
Une fois le procès terminé, en septembre, «ce jury pourra définitivement tourner la page du procès du 22 mars 2016. Et ne conserver que les bons aspects de cette expérience humaine hors normes. Chacun d’entre eux inspirera aussi le respect pour avoir incarné un citoyen exemplaire», conclut L’Avenir.