De plus en plus de travailleurs retournent dans leur ancienne entreprise: comment expliquer ce phénomène?
Beaucoup de travailleurs ayant quitté leur travail à cause de la pandémie de Covid-19 car ils pensaient trouver mieux souhaitent reprendre leur ancien travail.
Baptiste*, employé informatique à Paris, a quitté son emploi en juillet 2022 après avoir été débauché par une autre société. Il est devenu manager d’une équipe de deux personnes dans cette entreprise, spécialisée dans l’intelligence artificielle. «J’étais très emballé», se souvient-il alors qu’il tournait en rond dans son ancien travail.
Mais dans la pratique, cette nouvelle expérience s’est révélée plus complexe: tension dans son équipe, service désorganisé, méthodes de travail inexistantes… Le fossé entre l’imaginaire et la réalité est trop grand. Au bout de trois semaines, Baptiste sait qu’il quittera ce travail à la fin de sa période d’essai.
Si lui ne songe pas à revenir dans son ancienne entreprise, de plus en plus d’employés l’envisagent. Voilà une tendance qui s’accentue et que certains experts appellent «les employés boomerang». Ce phénomène entretient un lien direct avec la grande démission, une vague de départ dans les entreprises jamais enregistrée. Cette dernière s’est notamment manifestée sur le marché du travail américain. La tendance serait-elle maintenant au retour?
Selon une étude d’UKG, un cabinet de services et de gestion des ressources humaines, 43% des 4.000 répondants admettent qu’ils étaient «mieux dans leur ancien emploi». L’une des raisons à ce mécontentement: les démissions ont été hâtives et effectuées dans un marché de travail «hyper concurrentiel». En effet, 41% des personnes interrogées ont déclaré envisager de démissionner moins d’un mois avant de donner leur préavis.
«Beaucoup d’entre nous ont subi une sorte de choc lorsque la Covid a frappé et ont décidé de quitter des employeurs auparavant tolérables pour des options qui, nous l’espérions, nous donneraient plus de contrôle, plus d’argent ou simplement un autre ‘paysage’», a déclaré à CNBC Brad Harris, professeur en management et en ressources humaines à HEC Paris.
Ce retour des employés était déjà observé avant la pandémie de Covid-19, mais il est vrai que le phénomène s’accentue en 2022. Le vrai changement s’effectue du côté des employeurs.
L’étude américaine «The Corporate Culture and Boomerang Employee Study» réalisée en 2018, indique que 76% des ressources humaines acceptaient mieux l’embauche de salariés boomerang que par le passé.
JR Keller, professeur associé d’études sur les ressources humaines à l’ILR School de l’université Cornell, à New York, a déclaré à la BBC que «certaines entreprises avaient des politiques officielles interdisant les réembauches». Selon lui, les recruteurs craignaient que le fait de faire revenir ces employés suggérait «qu’ils récompensaient la déloyauté [et] encourageaient les autres à partir».
Des avantages pour les entreprises
Pourtant, recruter un ancien employé présente certains avantages pour les entreprises. Il connaît la maison, les équipes et la culture de l’entreprise. Le risque d’erreur de casting est limité. «Comme il est devenu normal de construire des carrières à travers différentes organisations, au fil du temps, même les responsables du recrutement eux-mêmes ont changé d’emploi. Ainsi, négliger un excellent candidat, simplement parce qu’il est parti pour une meilleure opportunité, semble contre-intuitif», commente JR Keller.