Comment la technologie influence-t-elle notre image de soi?

Les idéaux de beauté existent depuis la nuit des temps. À commencer par les femmes qui voulaient ressembler à des personnages historiques comme Cléopâtre. Par la suite, les magazines de mode et la publicité nous ont présenté «la silhouette parfaite» et, plus récemment encore, Instagram est venu déterminer la norme. Aujourd’hui, l’intelligence artificielle (IA) s’en mêle aussi de plus en plus fréquemment. Mais ces nouveaux outils suivent-ils les idéaux de beauté dominants de notre société?

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Rédaction en ligne
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Qui a un jour décidé qu’une taille fine, des fesses rebondies, des lèvres pulpeuses et un teint égal étaient les ingrédients qui font une belle femme? Et que chaque homme devait avoir une mâchoire carrée et des abdos en tablettes de chocolat? Dans le monde occidental, ce sont à quelques détails près les idéaux de beauté communs du 21e siècle. Il est un fait que l’homme et la femme «parfaits» sont différents selon la culture et évoluent à travers les âges. Par contre, les problèmes qui en découlent sont partout les mêmes.

Non représentatifs

Les idéaux qui nous sont imposés ne sont jamais représentatifs de chaque personne dans une communauté. Les industries des médias et de la mode ne tiennent aucun compte des différentes morphologies et apparences. «Il suffit de regarder n’importe quel magazine grand public, clip vidéo, casting de la plupart des shows télévisés, campagnes publicitaires ou concours de Miss pour constater que certaines morphologies sont encore toujours davantage prisées que les autres», explique le Dr Jill Andrew dans le magazine canadien Slice. Les personnes en situation de handicap, ayant une couleur de peau foncée ou de tailles plus fortes sont nettement moins représentées.

Tant les femmes que les hommes sont soumis à la pression d’entrer dans les standards. Nous n’avons aucune confiance en nous si nous ne répondons pas aux attentes. Elles affectent notre image de soi, ce qui peut entraîner des problèmes psychologiques comme des troubles de l’alimentation, la dépression et l’isolement social.

Body positivity

Depuis le début de ce siècle, les idéaux de beauté sont de plus en plus souvent contestés par le mouvement du body positivity. Ce dernier est né de la prise de conscience croissante de la diversité et en réaction aux mannequins extrêmement filiformes des années 1990. Les corps trop minces ont fait de la place aux mannequins avec des courbes. Depuis, des influenceuses et des célébrités partagent sans rougir leur cellulite et leurs autres imperfections sur Instagram.

Le danger des filtres Snapchat

Les médias sociaux contribuent à influencer notre image idéale. Nous nous comparons aux influenceurs et aux célébrités sur Instagram. Les filtres Snapchat nous donnent de longs cils, des lèvres pulpeuses et des yeux de félin comme ceux de Kim Kardashian.

Ces filtres Snapchat et Photoshop embellisseurs étaient une première version des actuels outils d’IA. Ainsi, certains programmes permettent aujourd’hui de montrer l’effet d’un produit de make-up ou d’une coupe de cheveux sur nous sans devoir les tester physiquement. Pratique si on cherche une couleur appropriée de fond de teint ou de gloss pour les lèvres!

Mais d’autres outils vont encore plus loin. Ils montrent notre apparence après une chirurgie esthétique du nez, une augmentation de poitrine, un lifting du visage ou un blanchiment des dents. Inutile de dire que ces applications créent chez beaucoup de personnes une image de soi déformée et une insatisfaction à propos de leur corps. Et ce n’est pas sans danger. «Une enquête menée auprès d’adolescents flamands a montré que les personnes qui recourent à de nombreux filtres du visage sont plus ouvertes à la chirurgie plastique et pensent aussi que ces interventions entraîneront une plus grande acceptation et popularité», avertit dans Fokus Laura Vandenbosch, experte des effets des médias à la KU Leuven.

L’influence de l’IA

Pendant ce temps, des algorithmes d’IA créent sur la base d’images existantes des personnages fictifs aux visages réalistes. Suivent-ils aussi les idéaux de beauté dominants d’une société?

The Boulimia Project, une organisation axée sur les troubles alimentaires, a effectué des tests. Ils ont demandé aux programmes d’IA Dall-E 2, Stable Diffusion et Midjourney de générer «la morphologie féminine ou masculine idéale selon les médias sociaux en 2023». L’organisation a qualifié les résultats d’«ahurissants»! 40% des images montraient des morphologies irréalistes. Les femmes avaient généralement une taille fine, des abdos et des courbes monumentales, tandis que les hommes avaient aussi une taille fine, des abdos toniques et une mâchoire nettement dessinée. De plus, l’IA préférait les femmes aux cheveux blonds, les hommes aux cheveux bruns et un teint olivâtre. «Le fait que l’IA produise des morphologies aussi inhabituelles sur la base des médias sociaux indique que ces plateformes font la promotion de morphologies irréalistes», a déclaré The Boulimia Project.

Sam Phoenix, de l’organisme de santé Great Green Wall, a effectué des tests similaires. Il a demandé à l’IA de créer pour chaque pays du monde une éventuelle Miss gagnante. D’après l’outil Midjourney, Miss Belgique a une opulente chevelure blonde, une carrure mince, un grand front et des pommettes hautes.

Sam Phoenix a conclu que «les idéaux de beauté sont tellement profondément enracinés dans le monde entier que même la nouvelle technologie d’IA est capable d’observer ces attentes pour les femmes».

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