Pourquoi l’avion est-il moins cher que le train?

En Europe, le train est en moyenne deux fois plus cher que l’avion. D’après Greenpeace, sur certaines lignes, le train est même30 fois plus cher que l’avion! C’est pourtant le moyen de transport qui doit nous mener vers un avenir durable. Comment se fait-il dès lors que voyager en train reste aussi cher et voyager en avion aussi bon marché?

par
Lien Delabie
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Examinons en tout premier lieu le prix d’un billet de train. Une analyse récente par Greenpeace Europe centrale et de l’Est a esquissé une image sombre des chemins de fer européens, et surtout de leur accessibilité financière. L’ONG a comparé les billets d’avion et de train de 112 lignes européennes différentes à neuf périodes différentes. La différence de prix s’est avérée considérable dans tous les pays. Un billet de train Madrid-Bruxelles coûte par exemple 15 fois plus qu’un billet d’avion. La ligne avec la plus grande différence de prix est celle entre Londres et Barcelone: le train peut être jusqu’à 30 fois plus cher que l’avion!

Il apparaît d’ailleurs que la Belgique figure dans le peloton de tête des billets de train chers: les lignes au départ de la Belgique coûtent en moyenne 2,6 fois plus que l’avion. Les billets de train simples aux Royaume-Uni et en Espagne sont plus chers. Mais il arrive aussiparfois que le train soit meilleur marché: c’est ainsi qu’un billet de train Bruxelles-Hambourg coûte 40 €, tandis que le billet d’avion coûte 62 €. De plus, il y a aussi quelques coûts cachés avec l’avion. Le train vous amène généralement dans le centre de la ville, tandis qu’un aéroport est situé en dehors de la ville. En d’autres mots, vous devez compter des frais supplémentaires pour le transport de et vers l’aéroport. Si vous vous rendez en voiture aux aéroports de Bruxelles ou de Charleroi, vous devez aussi tenir compte des places de parking chères. Néanmoins, le train reste en général l’option la plus chère, d’autant plus si on le compare avec les compagnies à bas coûts. Mais comment se fait-il qu’elles peuvent proposer des vols aussi bon marché?

1.

Les taxes avantageuses

Le secteur du transport aérien paie moins d’impôts comparé à celui du transport ferroviaire. C’est ainsi que les aéroports bénéficient d’exonérations fiscales pour le kérosène. Cette législation date de 1944, lorsque la Convention de Chicago a été conclue. À l’époque, ces lois visaient à stimuler le transport aérien. L’Union européenne débat depuis quelques années déjà sur la suppression progressive de cet avantage fiscal, mais elle a du mal à arriver à un accord. Une étude menée par la coupole environnementale Transport & Environment a dévoilé en juillet dernier que le secteur du transport aérien a reçu 35 milliards€ de subsides indirects en 2022. Cet avantage fiscal a causé un manque à gagner de 700 millions d€ à la Belgique.

2.

L’offre…

Le secteur du transport aérien peut aussi concurrencer plus facilement. Différentes compagnies d’aviation européennes volent vers les mêmes destinations et doivent dès lors attirer les clients avec des prix attractifs. Mais si vous voulez vous rendre de Bruxelles à Londres en train par exemple, il n’y a que l’Eurostar. Dans beaucoup de pays européens il n’y a qu’une seule compagnie ferroviaire aux mains de l’État. C’est la raison pour laquelle les prix des billets de train dépendent aussi davantage de l’offre et de la demande. Il est dès lors important, surtout en été, que les voyageurs réservent tôt. Enfin, les voyages en train ont le vent en poupe. C’est déjà apparu en 2022 lorsque les voyages en voiture sont devenus plus chers en raison de la hausse des prix de l’essence et les voyages en avion peu attrayants à cause des nombreuses grèves. Cette tendance se poursuit cette année. Des chiffres de la SNCB datant du début de l’été montrent que déjà plus de 128.000 voyageurs avaient acheté un billet de train vers l’étranger pour voyager en juillet et en août de cette année. C’est environ 26% de plus que lors de l’été record de 2019. Cette demande élevée entraîne des prix plus élevés.

3.

… et la demande

Car c’est là aussi que le bât blesse: l’offre de voyages en train n’est pas infinie. Les trains internationaux à destination de Londres et de Paris sont pleins à craquer en été et sont rapidement sold out. Ajouter des trains supplémentaires n’est pas évident. Si, par exemple, nous regardons la situation en Belgique, ces trains internationaux doivent circuler en plus du trafic ferroviaire national existant. Si on ajoute trop de voyages en train supplémentaires, le réseau ferroviaire va petit à petit se saturer. Les extensions du nombre de voyages en train internationaux constituent à chaque fois un casse-tête logistique. Il est difficile pour le trafic ferroviaire de concurrencer l’avion sur le plan de l’offre. Pour les compagnies d’aviation, c’est, notamment en raison de la vitesse du vol, nettement plus facile d’ajouter des vols supplémentaires.

Quelles sont les solutions possibles ?

1. Le ticket climat

Greenpeace plaide en faveur d’un ticket climat: des billets abordables qui sont valablesdans tous lestransports en commun d’un pays ou d’une région déterminée, y compris tous les trains et pourla traversée des frontières. Les tickets climatpourraient entre autres être financés par les impôts sur les bénéfices des compagnies pétrolières et gazières, la suppression progressive des subsides nocifs pour l’environnement ou par un système d’imposition juste sur base des émissions de CO2.

2.Une plateforme de comparaison des prix

L’économiste Jochen Maes voit une solution dans des plateformes comme Skyscanner ou Google Flights mais adaptées au transport ferroviaire, a-t-il expliqué au journal De Morgen. Via ce type de plateforme, on peut retrouver plus facilement la liaison internationale la moins chère et la plus rapide. Il existe actuellement l’app Trainline, mais elle ne renseigne pas toujours le trajet le plus logique.

3.Des remises et le rôle des autorités publiques

Différents gouvernements prennent des initiatives pour stimuler encore davantage le trafic ferroviaire. C’est ainsi que depuis le 1er mai, en Allemagne, on peut voyager sans limite en bus, métro, tram et train régional pour 49€ par mois. Des initiatives comme l’Interrail Pass européen rendent aussi les voyages en train plus abordables financièrement.

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