Qu’est-ce que l’astroturfing, cette technique de propagande dont il faut se méfier?
Ce terme n’évoque peut-être rien pour vous, pourtant c’est un phénomène que vous avez forcément côtoyé sur les réseaux sociaux. N’y voyez aucun rapport avec l’astrologie ou votre horoscope. L’astroturfing est une stratégie de désinformation, d’autant plus redoutable à l’ère du numérique. On vous explique en quoi ça consiste et comment le repérer.
À l’heure du web 3.0 et de l’information instantanée, les polémiques sont légion. Mais vous vous êtes-vous déjà demandé qui en était à l’origine? À l’ère des réseaux sociaux, pas toujours facile d’y voir clair. C’est parfois même l’objectif des initiateurs de campagnes d’astroturfing.
Une technique de manipulation
L’astroturfing, c’est la création de faux mouvements citoyens ou l’amplification artificielle de ceux-ci par un ou quelques individus. Le but de l’opération est de donner l’impression d’un mouvement de masse, à la fois populaire et spontané. L’idée: provoquer un engouement, un effet de foule autour d’une affaire, d’une personnalité, d’un événement, d’une idée…
En réalité, il s’agit d’une technique de manipulation. En donnant de l’ampleur à quelque chose qui n’en avait aucune, l’objectif de la manœuvre est de monter l’affaire en épingle: que la presse s’empare de cette «polémique» et que, par un effet d’entraînement, cela finisse par influencer l’opinion publique. Qui plus est, en donnant l’illusion d’un avis majoritaire, d’une majorité citoyenne, cela confère ainsi une sorte de crédibilité au propos.
Si le principe de l’astroturfing n’est pas neuf, sa portée est démultipliée avec le numérique. Cette stratégie reste néanmoins à la croisée des mondes virtuel et réel: après avoir mis une idée ou une affaire à l’agenda via les réseaux sociaux, les «astroturfers» entendent lancer des mouvements sur le terrain (via des manifestations, par exemple).
Qui sont les astroturfers?
L’astroturfing est présent dans une multitude de domaines et recouvre des stratégies diverses. Par exemple, il «suffit» de balancer des milliers de tweets en l’espace de quelques heures pour transformer le hashtag de son choix en trend sur le réseau à l’oiseau bleu. Ainsi, on peut «tromper les algorithmes» et faire croire à l’émergence d’un mouvement citoyen autour d’une tendance… alors qu’il s’agit d’un mouvement construit de toutes pièces. À l’origine de ces campagnes, on retrouve tantôt des militants politiques, des activistes, des entreprises, des lobbyistes… voire même des états.
Autre stratégie qui relève de l’astroturfing: l’utilisation de faux avis ou commentaires par une marque pour vanter les bienfaits de son produit… ou pour descendre celui de son concurrent. C’est par exemple le cas de Samsung, condamné en 2013 pour avoir payé des internautes missionnés pour laisser des avis encensant ses produits… et d’autres alertant sur de supposés défauts dans les smartphones de son concurrent, HTC.
Avec l’évolution des technologies, ces campagnes peuvent même aujourd’hui être pilotées par des algorithmes ou des bots. En créant et animant des faux comptes sur les réseaux (via des likes, retweet, commentaires et discussions basiques), cela leur permet d’alimenter d’autant plus cet effet de masse recherché.
Comment le déceler?
Il n’est pas simple de repérer une opération d’astroturfing. Car le problème, c’est bien que sa recette est à la fois simple et efficace. Tout le paradoxe, c’est qu’une fois que la campagne est dévoilée, c’est qu’il est déjà trop tard: la rumeur a tellement été reprise que la polémique a pris.
Alors quand une tendance ou un mouvement apparaît subitement sur les réseaux, mieux vaut prendre un peu de recul. Diversifier ses sources d’information et en vérifier la provenance. Quelques outils en ligne peuvent vous y aider, à l’image de Hoaxy, un logiciel qui chasse les fake news et permet d’identifier les comptes Twitter cachés derrière une nouvelle trend. Si ceux-ci ont été créés il y a quelques jours, il y a des chances que vous vous soyez fait piéger par une opération d’astroturfing.