Planter des arbres pour atteindre la neutralité carbone? Ce n’est pas si simple

Une recherche réalisée dans une région montagneuse d’Angleterre démontre que la reforestation est insuffisante pour pallier les pressions climatiques auxquelles les forêts sont confrontées. Une gestion éclairée du bétail et un emplacement stratégique pour la plantation des arbres pourraient toutefois limiter les pertes, estime l’étude.

par
ETX Studio
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Le Royaume-Uni, tout comme la Chine, l’Arabie saoudite, le Japon ou la Corée du Sud, se sont donnés pour objectif d’atteindre la neutralité carbone dans les décennies à venir. Autrement dit, ces pays ambitionnent de stocker autant de carbone qu’ils en émettent. Un dessein ambitieux, dont la principale stratégie repose sur des financements de vastes projets de création de puits de carbone, comme le fait de planter des arbres.

Une réalité beaucoup plus compliquée

Indispensables dans la lutte contre le changement climatique, les forêts représentent en effet (avec les océans) l’un des plus puissants puits de carbone au monde. La solution semble donc simple et à portée de main. Mais c’est en réalité beaucoup plus compliqué, comme l’ont déjà souligné plusieurs spécialistes de l’environnement.

Une récente recherche réalisée par des chercheurs britanniques de l’université de Plymouth (Angleterre) le démontre à travers un exemple concret. L’étude s’est concentrée sur la région montagneuse de Dartmoor, située dans le sud-ouest du pays. Les chercheurs ont observé l’expansion et de la connexion des forêts de chênes, communément appelées «forêts pluviales tempérées».

Publiés dans la revue Ecological Solutions and Evidence, les travaux ont révélé que la présence du bétail qui broute la végétation environnante entrave la croissance des jeunes chênes. Ceux qui subsistent sont moins hauts et avec une espérance de vie n’excédant généralement pas les huit ans s’ils ne bénéficient pas de protection.

Un niveau d’expansion naturelle insuffisant

Au global, l’étude a estimé que la régénération naturelle des jeunes plants de chêne sur plusieurs sites du Dartmoor était limitée à 20 mètres de l’arbre adulte le plus proche. Selon les chercheurs, ce niveau d’expansion naturelle est insuffisant pour contribuer de manière adéquate au stockage du carbone, ainsi qu’à l’atténuation des inondations et à l’apport de biodiversité nécessaire au rythme auquel de ces paysages montagneux.

«La plantation d’arbres et la fin de la déforestation sont de plus en plus mises en avant comme des mécanismes peu coûteux et respectueux de l’environnement pour lutter contre le changement climatique. Ces mesures ont été prises en compte dans les programmes «net-zéro» du Royaume-Uni et d’autres gouvernements et les dirigeants mondiaux se sont également engagés à aborder cette question lors de la COP26 à Glasgow l’année dernière», développe le Dr Thomas Murphy, auteur principal de l’étude.

«Nos résultats suggèrent toutefois que l’expansion des forêts de chênes dans les systèmes de pâturage des hautes terres du Royaume-Uni n’est pas un processus simple. Ils peuvent avoir un rôle critique à jouer, mais ces importantes forêts pluviales tempérées ont été historiquement dégradées et sont maintenant très fragmentées», poursuit le chercheur.

Quelques pistes

L’étude suggère toutefois quelques pistes pour une gestion raisonnée de ces forêts pluviales tempérées. Parmi les solutions mentionnées, planter des chênes âgés entre 4 et 7 ans directement dans des zones où la végétation dense, afin de protéger les jeunes plants de l’action du bétail. Ou encore d’exclure le bétail sur les sites où les jeunes chênes (1-3 ans) se développent, afin d’augmenter leur croissance et leur survie.