Le vrai gangster derrière Boardwalk Empire
Il était évident, dès le début, que Boardwalk Empire serait une série formidable. Tous les éléments clés pour en faire un succès étaient présents: le talentueux Steve Buscemi dans le rôle principal, le soutien du réalisateur de légende Martin Scorsese et une histoire passionnante basée sur celle de célèbres criminels américains pendant la prohibition dans les années 20. Al Capone est sans nul doute le gangster le plus connu qui apparaît dans Boardwalk Empire, mais une kyrielle d'autres personnages sont aussi basés sur des criminels qui ont véritablement existé. Maintenant que sort la toute dernière saison de Boardwalk Empire en DVD et Blu-ray, il nous a semblé que c'était le bon moment d'en dresser le portrait.
Enoch Johnson
Si Enoch «Nucky» Johnson a inspiré le personnage principal, Nucky Thompson, leurs histoires diffèrent toutefois. Johnson était aussi le trésorier corrompu d'Atlantic City et un personnage clé dans la contrebande d'alcool sur la Côte Est américaine pendant la prohibition. En tolérant la prostitution, les jeux de hasard et l'alcool, alors qu'ils étaient interdits dans le reste de l'Amérique, il a fait d'Atlantic City un endroit très prisé.
Johnson était un criminel, mais contrairement à Thompson ce n'était pas un véritable gangster. Pour autant qu'on le sache, il n'a jamais tué ou fait tuer personne. Il ne s'occupait pas non plus des luttes de territoire. Il faisait partie du cartel de la contrebande «The Big Seven», où siégeaient aussi des gangsters très violents, mais ses méfaits ont surtout porté sur la contrebande d'alcool et l'évasion fiscale.
Al Capone
C'est sans aucun doute un des gangsters les plus connus de tous les temps, qui ne pouvait dès lors pas être absent de Boardwalk Empire. Capone est né à Brooklyn, New York, où il a gravi les échelons du Five Points Gang. Il s'installera par la suite à Chicago à l'invitation de Johnny Torrio, pour y devenir videur et, finalement, bras droit de Torrio.
Après une tentative d'assassinat ratée tant sur la personne de Capone que celle de Torrio, Capone prend les rênes et devient le patron de «Chicago Outfit». Comme il gagnait des montagnes d'argent, il pouvait acheter pratiquement tous les agents et tous les hommes politiques, si bien qu'il faisait son business en toute impunité à Chicago. C'est principalement la guerre des bandes avec le North Side Gang, qui avait perpétré l'attentat contre Capone et Torrio, qui engendrait de nombreuses violences. En 1932, Capone est emprisonné à Atlanta pour évasion fiscale. Il sera par la suite transféré à Alcatraz, où son état de santé périclitera en raison de sa syphilis.
Johnny Torrio
Johnny Torrio n'est peut-être pas le gangster le plus connu, mais il a néanmoins exercé une grande influence sur le milieu américain. Elmer Irey, un fonctionnaire du ministère américain des finances, a jadis qualifié Torrio de plus rusé de tous les criminels. Torrio a grandi à New York et est devenu très vite un membre éminent du Five Points Gang. Par le biais de liens familiaux, Big Jim Colosimo lui demande son aide contre des maîtres chanteurs à Chicago. Mais quand Colosimo refuse de s'embarquer dans la contrebande d'alcool au début de la prohibition, Torrio décide de le supprimer. Il le fait tuer et prend les rênes à Chicago. Après un attentat raté contre sa personne, Torrio confie à son protégé, Capone, l'entière direction du «Chicago Outfit».
Cette tentative de meurtre, Torrio la considère comme le signe qu'il doit se retirer et rentrer en Italie, mais pas pour longtemps! Les pressions exercées par Mussolini sur la maffia l'incitent à revenir aux États-Unis, où il reprend du service comme conseiller. C'est lui qui conseillait «The Big Seven» et qui a aussi eu l'idée de créer un syndicat national du crime pour empêcher les guerres entre bandes.
Charles «Lucky» Luciano
Lucky Luciano démarre très jeune sa carrière de criminel. Il a arrêté l'école à 14 ans. Après avoir remporté 250 dollars aux dés, il décide de gagner sa vie dans la rue. Il fonde sa propre bande, qui ne s'occupe pas de petits méfaits. À la place, il offre sa protection à de jeunes juifs importunés par des bandes italiennes et irlandaises. C'est ainsi qu'il fait la connaissance de son partenaire du crime Meyer Lansky.
Finalement, c'est Luciano qui mettra en pratique l'idée de Johnny Torrio. Il réunit les cinq familles de la maffia de New York et fonde «The Commission», une organisation criminelle coupole avec notamment les Five Families de New York et le Chicago Outfit d'Al Capone. De par son influence sur pas mal de familles de la maffia, il est considéré comme le père du crime moderne organisé aux États-Unis.
Meyer Lansky
Le bras droit de Lucky Luciano possédait avec Benjamin «Bugsy» Siegel sa propre bande, qui s'adonnait à la contrebande et au trafic. Il fait la connaissance de Luciano quand il offre sa protection à Lanksy contre les bandes italiennes et irlandaises. Lansky et Luciano deviennent bons amis, travaillent ensemble pour Arnold Rothstein et développent une collaboration «fructueuse».
Malgré ses activités de contrebande, Lansky ne sera accusé que d'organisation de jeux de hasard illégaux. Ses agences de pari et ses casinos n'ont de plus jamais été manipulés, tout se passait de façon «honnête». Ses gains provenaient de son excellente maîtrise du calcul des probabilités. L'argent qu'il gagnait, il a su le cacher aux autorités grâce à ses comptes en banque en Suisse, si bien qu'il n'a pas été coffré comme Al Capone. Cela lui vaudra finalement le surnom de «Mob's accountant» (comptable de la maffia).
Benjamin «Bugsy» Siegel
Siegel n'était pas seulement un ami d'enfance de Meyer Lansky, il faisait aussi partie des amis d'Al Capone. Bugsy est sans le moindre doute un des membres les plus agressifs de «Bugs and Meyer Mob» et il sera d'ailleurs aussi engagé comme tueur à gages dans des règlements de compte entre vieux parrains de la maffia, comme Joe Masseria.
Pour un tueur à gages, Siegel était apparemment un homme particulièrement charismatique et sympathique. Il a pas mal d'amis célèbres à Hollywood, comme Clark Gable, Gary Cooper, Louis B. Mayer et Frank Sinatra. Après un certain temps, Siegel veut toutefois se ranger et devenir un homme d'affaires. Il reprend alors l'hôtel Flamingo à Las Vegas. Il pompe pas mal d'argent de la maffia à Las Vegas et dans son hôtel, mais quand on se rend compte que son hôtel est dans de sales draps, il est assassiné dans sa maison de Beverly Hills. Il a inspiré le personnage de Moe Green dans The Godfather (Le Parrain).
Arnold Rothstein
D'après Leo Katcher, écrivain spécialiste de la pègre, c'est Arnold «The Brain» Rothstein qui a transformé le crime organisé en entreprise. Dès son plus jeune âge, il était évident qu'il se lancerait dans les jeux de hasard. Rothstein était particulièrement bon en mathématique et il ne pouvait pas s'empêcher de jouer aux dés et de parier. Peu de temps après avoir lancé son affaire en toute légalité, il se diversifie dans des affaires moins légales comme un casino et les courses de chevaux. Il est convoqué par un juge pour une affaire de corruption dans le cadre du 1919 World Series Baseball, mais ne sera jamais condamné.
Comme il entrevoit dans la prohibition une belle opportunité de faire des affaires, il décide de se diversifier dans l'alcool et la drogue. Les membres de son organisation criminelle étaient des «talents» comme Meyer Lansky, Bugsy Siegel et Lucky Luciano. Les jeux de hasard sont finalement aussi ce qui lui sera fatal. Après une partie de poker de trois jours, il se retrouve avec plus de 300.000 dollars dans le rouge. Rothstein affirme que le jeu a été truqué et refuse de payer, ce qu'il paiera de sa vie. Il refusera sur son lit de mort de livrer le nom de son assassin.
George Remus
Le «King of the Bootleggers» n'a pas grandi dans un milieu criminel. À 14 ans, il travaillait dans une pharmacie pour soutenir sa famille, parce que son père ne pouvait pas travailler. À 19 ans, il rachète cette pharmacie et en reprendra même encore une autre par la suite. Cinq ans plus tard, Remus en a assez du petit monde de la pharmacie et devient avocat. Il se spécialise dans la défense des criminels, surtout dans les affaires de meurtre.
En 1920, Remus se rend compte que ses clients deviennent immensément riches du jour au lendemain. Il étudie le Volstead Act (la loi qui a établi la prohibition) et y découvre une faille. Il achète des distilleries et des pharmacies, de façon à pouvoir se vendre à lui-même de l'alcool à des fins médicales. Ces livraisons étaient alors détournées par son propre personnel, ce qui lui permettait de vendre de l'alcool de façon illégale. C'est ainsi qu'il réunit en moins de 3 ans 40 millions de dollars, une somme astronomique à l'époque. Il partage néanmoins souvent ses richesses avec les pauvres et organise des fêtes exorbitantes. On raconte aussi que c'est pour cette raison qu'il a inspiré le personnage de Jay Gatsby dans The Great Gatsby (Gatsby le Magnifique).
Le FBI n'étant pas d'accord avec la faille trouvée par Remus, un jury le condamne en 1925 pour plus de 1.000 violations du Volstead Act. En prison, il confie à un agent que c'est sa femme qui gère sa fortune. Cet agent quitte son boulot sur le champ, séduit la femme de Remus et ils dilapident ensemble toute sa fortune. Quand Remus sort de prison, il abat sa femme. Il assurera sa propre défense à son procès et plaidera l'état provisoire de démence. Il s'en sortira avec 8 mois de prison.
Vous pouvez voir tous ces criminels à l'uvre dans Boardwalk Empire. La cinquième saison de cette série à succès est4 dans les bacs depuis le 18 mars en DVD et Blu-ray.